Alors que le Covid-19 met déjà sous pression les chaînes d’approvisionnement, le blocage depuis quatre jours d’un porte-conteneur de 400 mètres de long « ne pouvait pas tomber à un pire moment pour le canal le plus emprunté » au monde, a commenté Jonathan Owens, expert en logistique à la University of Salford Business School.
La valeur totale des biens bloqués ou devant emprunter une autre route diffère selon les estimations: de 3 milliards de dollars par jour selon Jonathan Owens, à 9,6 milliards selon Lloyd’s List, revue britannique sur le transport maritime.
« Étant donné le très grand nombre de parties prenantes qui sont touchées par la situation, directement mais aussi indirectement, il est impossible à ce stade de quantifier la valeur des marchandises » retardées, estime Daniel Harlid, analyste pour Moody’s.
Surtout, blocage n’égale pas automatiquement perte, rappelle à l’AFP Jai Sharma, avocat spécialisé dans le transport maritime pour le cabinet Clyde and Co. S’il est possible de s’accorder sur les milliards de dollars de marchandises retardées, l’impact pour les entreprises et les possibles réactions en chaîne ne peuvent encore être quantifiés et dépendront des stocks dont elles disposent.
Pour le secteur pétrolier, la pilule devrait être moins dure à avaler, car seulement 1,74 million de barils transitent chaque jour par le canal. Le peu du pétrole du Golfe qui est destiné à l’Europe passe à 80% par l’oléoduc Sumed, dit Paola Rodriguez Masiu, de Rystad Energy. Et le pipeline a de la capacité disponible.
Aujourd’hui, les opérateurs sont confrontés au dilemme d’attendre la réouverture du canal, en espérant qu’elle intervienne rapidement, ou perdre une semaine ou une dizaine de jours pour contourner l’Afrique par le cap de Bonne Espérance.
C’est ce que le géant du transport maritime Maersk et l’Allemand Hapag-Lloyd envisageaient de faire.
Un tel détour peut se chiffrer en centaines de milliers de dollars, soit un surcoût de l’ordre de 15 à 20%, a détaillé à l’AFP Plamen Natzkoff, analyste pour VesselsValue.
Et ce, alors que la grande majorité des trajets – jusqu’à 90% – n’est pas assurée contre les retards, relève Lloyd’s List. Citant des observateurs, la revue indique qu’il faut s’attendre à de nombreux litiges pour déterminer qui devra en supporter le coût.
Concernant les opérations de déblocage du navire, la note devrait s’avérer salée avec « plusieurs millions » de dollars, selon Jai Sharma, notamment si le délestage d’une partie du navire s’avère nécessaire.
Néanmoins, « les polices d’assurance des transporteurs de marchandises sont généralement souscrites par plusieurs assureurs, souvent étrangers, de sorte que les pertes seront partagées entre les assureurs et les réassureurs », souligne Soichiro Makimoto, analyste pour Moody’s.