« Bien sûr qu’il y a un sujet », reconnaît auprès de l’AFP Patrick Pourbaix, directeur général France de MSC Croisières. « Mais cela fait belle lurette que nous l’avons pris à bras le corps », ajoute-t-il alors que doit sortir bientôt des Chantiers de l’Atlantique, le premier bateau de la compagnie fonctionnant au gaz naturel liquéfié (GNL) et équipé d’une pile à combustible (150 kilowatts).
Le GNL « n’est pas la solution ultime », selon lui, mais « c’est 25% de CO2 en moins par rapport au fioul, des particules fines quasiment inexistantes et des oxydes de soufre et d’azote terriblement réduits ».
La quasi totalité de la flotte MSC de 19 navires (21 à la fin de l’année) est aussi équipée de « laveurs de fumée » réduisant à « plus de 95% les émissions d’oxyde de soufre » et de pots catalytiques « qui annihilent 97% des oxydes d’azote ».
Son concurrent Costa Croisière a été le premier à proposer des navires au GNL avec l’Aida Nova lancé en 2019 puis le Costa Smeralda en 2021. Royal Caribbean International, propriétaire du Wonder of the sea, le plus gros paquebot mondial bloqué brièvement dans le port de Marseille en août, lancera en 2023 le Silver Nova utilisant également le GNL et une pile à combustible à base d’hydrogène qui alimentera les opérations hôtelières (jusqu’à 4 mégawatt).
Le GNL, « le carburant marin le plus propre disponible à grande échelle aujourd’hui, est devenu une réalité pour notre industrie », selon la Cruise Lines International Association (CLIA) qui regroupe les principales compagnies de croisière. En 2021, quatre navires étaient au GNL et 22 en commande pour une flotte mondiale d’environ 300 navires sur les 70.000 estimés de la flotte commerciale.
– « Un bateau de 300 mètres, ça se voit » –
L’industrie des croisières a investi plus de 22 milliards de dollars pour doter ses navires de nouvelles technologies et carburants plus propres, selon la CLIA.
Cette dernière a fixé pour objectif la neutralité carbone d’ici 2050 avec une étape intermédiaire de réduction de 40% des émissions par rapport à 2008 en 2030. « Selon nos estimations, nous pensons y arriver dès 2027 », se félicite pour MSC Patrick Pourbaix.
« Un bateau de 300 mètres qui entre dans le port, ça se voit mais ce qu’on ne voit pas, ce sont les bus, les centaines d’avions, les centaines de voitures qui entrent dans les villes », se défend Luigi Stefanelli, directeur général de Costa.
« Une croisière, c’est une véritable ville connectée sur l’eau », estime-t-il soulignant que les déchets à bord sont traités et les surplus distribués à des associations caritatives. Entre 2018 et 2020 puis entre juillet 2021 et juin 2022 Costa a offert 8,5 tonnes de nourriture à la Banque alimentaire.
« On a cet avantage de savoir exactement ce qui va monter à bord et être consommé », ajoute M. Pourbaix, « on peut ainsi tracer le circuit des produits jusqu’au recyclage. C’est beaucoup mieux maîtrisé que certaines activités terrestres », selon lui. « On a des incinérateurs à bord pour brûler les déchets et les plastiques à usage unique ont été éradiqués à bord depuis longtemps », assure-t-il.
L’eau provient de dessalinisateurs d’eau de mer et les eaux usées sont filtrées à bord. « On est plus performant que n’importe quel club terrestre », avance M. Pourbaix.
« Nous continuons à investir, nous gardons les yeux ouverts, nous inventons », poursuit Luigi Stefanelli. Grâce à de nouvelles peintures sur les coques des navires permettant de mieux glisser dans l’eau un bateau réduit de 10% sa consommation de fuel, les itinéraires sont revus pour faire moins de trajets, Costa utilise l’énergie produite par ses ascenseurs pour d’autres activités, les Chantiers de l’Atlantique travaillent sur des voiles de bateaux en kevlar sous l’oeil intéressé de MSC…
Quant à la pollution lors des stationnements au port, les paquebots proposent de se brancher électriquement mais contrairement à Southampton (Grande-Bretagne) ou Kiel (Allemagne), les ports français ne sont pas encore équipés de prises même si les projets sont en cours à Marseille, Toulon et Nice ou Le Havre.
kap/mdr/pta