Pour la troisième fois depuis son arrestation fin juillet à Nuuk, capitale du territoire autonome danois, « le ministère public a demandé une prolongation de la période de détention », écrit à l’AFP la procureure en charge du dossier, Mariam Khalil.
Les défenseurs du militant américano-canadien de 73 ans estiment à regret que la justice ira dans le sens du parquet, faute d’une décision rapide du Danemark sur la demande d’extradition.
« Je pense toujours qu’il devrait être relâché », dit à l’AFP son avocate Julie Stage. « A terme, la question de la proportionnalité (de la détention provisoire par rapport au délit) va poser problème ».
Pourtant, l’audience, prévue pour durer une heure et demi, « risque d’être un bis repetita des deux dernières audiences à Nuuk, une parodie de justice », dénonce la présidente de Sea Shepherd France, Lamya Essemlali.
Fondateur de Sea Shepherd et de la fondation en faveur des océans qui porte son nom, Paul Watson a été arrêté le 21 juillet alors qu’il était en route avec son navire le John Paul DeJoria pour intercepter un nouveau navire-usine baleinier nippon.
Le Japon réclame son extradition, ayant relancé une demande émise dès 2012 via une notice rouge d’Interpol. Il l’accuse d’être co-responsable de dommages et blessures à bord d’un navire baleinier nippon deux ans plus tôt dans le cadre d’une campagne menée par Sea Shepherd.
Mi-septembre, les avocats du militant septuagénaire ont saisi le Rapporteur spécial des Nations unies sur les défenseurs de l’environnement, dénonçant notamment le risque qu’il encourt de « subir (d)es traitements inhumains (…) dans les geôles japonaises ».
Selon eux, la demande japonaise repose sur des affirmations « fallacieuses », ce qu’ils voudraient démontrer en présentant au tribunal de Nuuk des extraits vidéos des événements, filmés par la chaine Discovery, une requête qui leur a été refusée lors des deux dernières audiences.
En outre, selon eux, ce délit n’est pas passible de prison dans le droit groenlandais.
– « Processus lent » –
Au-delà de la question du maintien en détention, les avocats sont suspendus à la décision du ministère danois de la Justice de décider d’extrader ou non Paul Watson. Le ministère a indiqué à l’AFP que l’examen de la demande officielle d’extradition était « en cours », sans donner de calendrier.
« Le processus est lent. La police groenlandaise fait son enquête qu’elle doit transmettre au procureur-général qui doit faire ses recommandations au ministre », explique Mme Stage.
« On veut que le ministre danois prenne enfin une décision. En ce moment, ils le laissent croupir en prison, c’est franchement problématique », tempête Mme Essemlali.
D’après elle, les conditions de la détention provisoire du militant se sont récemment durcies.
« Ils lui ont quasiment coupé tout contact avec l’extérieur. Il n’a plus droit qu’à 10 minutes de téléphone par semaine avec sa femme », dit-elle.
Personnalité controversée dans le milieu environnementaliste, notamment en raison de ses méthodes musclées, le militant a obtenu la signature de 100.000 personnes à la pétition demandant sa remise en liberté. Sur le plan politique, Paris a demandé à Copenhague de ne pas l’extrader.
Depuis sa cellule du centre pénitentiaire de Nuuk, un bâtiment gris moderne situé à flanc de rochers, Paul Watson affiche sa détermination à poursuivre son combat.
« S’ils imaginent que cela va empêcher notre opposition! J’ai seulement changé de navire, et mon navire actuel, c’est +Prison Nuuk+ », a-t-il déclaré fin août dans un entretien à l’AFP. Les Japonais « veulent m’utiliser à titre d’exemple pour montrer qu’on ne doit pas toucher à leur chasse à la baleine ».
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