Bouteille de champagne frappant la coque et rubans rouges claquant au vent, le navire, qui n’a pas encore de nom, a été mis à flot aux chantiers navals de Dalian (nord-est), a annoncé l’agence de presse Chine nouvelle.
« La construction d’un premier porte-avions indigène en Chine est sans nul doute un événement historique puisqu’elle hisse la Chine au rang des quelques puissances militaires mondiales en mesure de le faire, aux côtés des Etats-Unis, de la Russie, du Royaume-Uni, de la France, de l’Italie et de l’Espagne », observe Juliette Genevaz, spécialiste de la Chine à l’Institut de recherche stratégique de l’Ecole militaire française.
« On peut parler de bond technologique parce qu’il est très probable qu’il s’agisse du premier d’une série de porte-avions indigènes », remarque-t-elle.
Pékin dispose déjà d’un porte-avions, le Liaoning, dont la coque avait été produite dans l’ex-URSS il y a plus d’un quart de siècle. Le Liaoning, mis officiellement en service en 2012, a seulement effectué à la fin de l’an dernier ses premiers exercices à tirs réels et sa première sortie dans le Pacifique.
Chine nouvelle n’a pas précisé la date prévue pour la mise en service du nouveau bâtiment. Il faudra compter environ deux ans pour que le bateau soit entièrement équipé et fasse ses premiers essais véritables en mer, prévoit Mme Genevaz.
Le navire sera à propulsion conventionnelle, et non nucléaire, et transportera notamment des Shenyang J-15, un avion de combat de l’aéronavale chinoise, avait précisé le ministère de la Défense en annonçant la construction du bâtiment en décembre 2015.
– Deux contre dix –
La deuxième puissance économique mondiale tente depuis des années de moderniser ses forces armées, particulièrement sa marine, à l’appui de ses prétentions en mer de Chine méridionale, une zone dont la souveraineté est contestée par plusieurs pays riverains.
La mise à flot du navire survient en plein regain de tension internationale autour de la Corée du Nord et de son programme nucléaire et balistique. Le président américain Donald Trump a annoncé l’envoi d’un porte-avions, le Carl Vinson, au large de la péninsule coréenne, afin de faire pression sur le régime de Pyongyang.
Si la Chine dénonce également le programme nucléaire de son petit voisin, elle a appelé les Etats-Unis à la retenue dans ce dossier.
Mais l’armée chinoise est encore très loin de rattraper l’armée américaine, qui possède une dizaine de porte-avions opérationnels ainsi que quelque 600 bases militaires dans une cinquantaine de pays, alors que Pékin ne compte pour l’heure qu’une seule base à l’étranger, à Djibouti, rappelle Mme Genevaz.
Les nouveaux porte-avions chinois sont pour l’instant surtout une question de statut pour la Chine, relève James Char, expert à l’école S. Rajaratnam d’études internationales à Singapour. « Il est très peu probable qu’ils posent une menace pour les Etats-Unis si l’on prend en compte l’avance technologique des porte-avions américains », souligne-t-il.
On ne pourra parler de percée technologique que le jour où des porte-avions chinois auront la propulsion nucléaire et des catapultes pour le lancement des avions, ajoute l’expert.
Pékin a annoncé en début d’année une hausse de 7% de son budget militaire à 1.040 milliards de yuans (143 milliards d’euros). Si la Chine a multiplié par 10 son budget de défense en 15 ans, il reste loin derrière celui des Etats-Unis, qui atteint 575 milliards d’euros.