Tour d’horizon d’un secteur prospère en Europe mais fragile.
Une force en Europe, mais déficitaire
La France est le troisième producteur de poissons (pêche et aquaculture confondues) de l’Union européenne, derrière l’Espagne et le Danemark, avec quelque 718.000 tonnes en 2019, selon les données du gouvernement.
En 2020, la France a vendu pour 1,2 milliard d’euros de poissons frais et congelés. Elle est, par ailleurs, le leader européen de la production d’huîtres et au premier rang des ventes (en valeur) pour les moules (2e derrière l’Espagne en volume).
Malgré cela, la pêche française reste minoritaire sur les étals nationaux (moins de 25% du poisson vendu) et déficitaire, avec des importations qui excèdent largement ses exportations, contribuant pour 4,3 milliards d’euros au déficit du commerce extérieur français.
Le goût des Français pour le saumon et la crevette pèse dans la balance: ces deux espèces constituent, à elles seules, le tiers des importations de poissons (2,2 milliards d’euros en 2018).
Des armements vieillissants
La flotte française a diminué de plus d’un quart en 20 ans, pour atteindre 7.681 navires en 2020, dont 4.243 en métropole.
En métropole, elle est composée essentiellement de petits bateaux: 3.403 navires font de moins de 12 mètres et une minorité (moins de 200 bateaux) est dédiée à la pêche au grand large.
La pêche au chalut approvisionne la moitié de l’offre française. Elle permet de pêcher les espèces près du fond comme le cabillaud, le merlu, ou la lotte ainsi que des espèces pélagiques comme l’anchois.
Le reste des approvisionnements se fait avec des filets (raie, sole), mais aussi à la drague (coquilles Saint-Jacques), avec des casiers (crabes, homards) et à la palangre (requins, thons et dorades).
La flotte vieillissante se renouvelle doucement. Depuis 2018, 70 à 80 nouveaux navires sortent des chantiers chaque année. Objectifs: réduire la facture énergétique, améliorer la qualité de vie à bord pour attirer de nouveaux marins et développer une pêche plus verte.
Un métier rémunérateur qui manque de bras
En 2019, la France comptait 13.120 marins-pêcheurs (en équivalent temps plein). Près de la moitié (46%) ont plus de 45 ans et partiront dans les cinq à 10 ans.
Leur rémunération mensuelle varie entre 2.500 et 3.000 euros nets, selon France Filière Pêche, avec de fortes variations dans l’année selon les espèces pêchées et la météo.
Et pourtant, la filière a du mal à recruter: on estime entre 200 et 300 le nombre de matelots qui manquent.
Pointés du doigt comme responsables de la surpêche, les marins ont pourtant participé aux efforts communs: outre le respect des quotas et périodes de pêche, ils participent à la gestion durable de la ressource, par exemple pour la coquille Saint-Jacques, en ensemençant les côtés français de la Manche.
En 2020, 56% des volumes pêchés en France étaient issus de stocks exploités durablement, contre 15% il y a 20 ans, selon l’Ifremer. Ce qui reste « encore loin de l’objectif de 100% fixé par la Politique commune de la pêche ».
Il y a moins de « stocks surpêchés » mais « la part provenant de stocks effondrés a augmenté (10% du total) du fait de la situation du stock de sardine du golfe de Gascogne », souligne l’Ifremer.
Le choc du Brexit
Si plus d’un millier de licences de pêches post-Brexit ont finalement été octroyées par le Royaume-Uni et les îles Anglo-Normandes, des dizaines de pêcheurs restent sur le carreau, près de deux ans après l’accord de commerce entre Londres et Bruxelles.
La France s’est engagée à indemniser ceux affectés par le Brexit et un plan d’accompagnement individuel – ou « plan de sortie de flotte » – doit être finalisé dans les jours qui viennent, notamment en tenant compte du chiffre d’affaires réalisé dans les eaux britanniques.
Les pêcheurs s’inquiètent des modalités techniques (types de filets, quotas) dont seront assorties les nouvelles licences. Ils redoutent un « risque de surpêche », notamment après l’été 2026 quand les navires européens devront renoncer à 25% de leurs captures dans les eaux britanniques.