Le Mozambique veut convaincre les donateurs qu’il n’achète pas des armes

Menacés d’un gel de l’aide étrangère selon des sources diplomatiques, les responsables mozambicains ont rencontré les ambassadeurs du « G19 », le groupe des donateurs, pour une réunion de crise à Maputo qui s’est achevée sans conclusion publique immédiate.

Les obligations, garanties par l’Etat, ont été émises à hauteur de 850 millions de dollars pour financer une flottille de 27 navires, dans le cadre d’un accord facilité par Credit Suisse et la banque russe VTB Bank.

Peu après cette émission obligataire, les Constructions mécaniques de Normandie (CMN) de Cherbourg (ouest de la France) ont annoncé un contrat légèrement étoffé prévoyant la vente au Mozambique de 30 bateaux –24 chalutiers et 6 patrouilleurs–, pour 200 millions d’euros.

L’énorme différence entre la somme empruntée et le contrat avec Cherbourg n’a pas manqué de soulever des interrogations, même si les autorités mozambicaines assurent que l’argent va servir à acheter des radars, des équipements de surveillance, bâtir un centre de contrôle et former du personnel.

Pour Guy Martin, rédacteur en chef du site spécialisé sud-africain Defence Web, ces bateaux peuvent tout à fait être utilisés pour le combat. Ils peuvent le cas échéant être équipés de canons, de mitrailleuses et servir pour lancer des drones.

« Techniquement parlant, ils peuvent être livrés sans armes et le fabricant peut légitimement dire qu’ils ne sont pas armés », a-t-il dit à l’AFP avant d’ajouter que « les opérateurs privés peuvent ensuite les armer ».

Des donateurs prêts à suspendre leur assistance

Le Mozambique est l’un des pays les plus pauvres du monde et un tiers du budget de l’Etat est couvert par l’aide étrangère.

Et aux yeux des donateurs, si le pays est capable de faire des dépenses militaires importantes, l’aide ne se justifie plus.

Certains d’entre eux sont prêts à suspendre leur assistance tant que toute la clarté ne sera pas faite sur cette affaire, ont indiqué des sources diplomatiques à l’AFP.

L’ambassadeur italien Roberto Vellano, qui préside le G19, a exigé que le gouvernement donne « des renseignements pertinents dans un esprit de transparence pour répondre aux préoccupations des donateurs et des partenaires » du pays.

La polémique pourrait également mettre le Mozambique en fâcheuse position face aux investisseurs internationaux, alors que l’émission obligataire controversée a connu un vif succès car elle offre des rendements nettement plus élevés que ceux trouvés sur les marchés développés.

Credit Suisse a demandé des comptes. Dans un communiqué, la banque helvétique a appelé les entrepreneurs et le gouvernement mozambicain à « confirmer officiellement dans des déclarations publiques qu’il n’y a pas d’armes ou de systèmes de combat de toute nature sur aucun des bateaux en cours de construction et financé grâce à Credit Suisse ».

Le vice-ministre des Affaires étrangères Henrique Banze n’avait pas rassuré en septembre en affirmant que les navires de la CMN serviraient à défendre les côtes mozambicaines, un malentendu selon lui.

« J’ai été compris comme disant: +Oui, nous achetons beaucoup d’armes!+ », a-t-il reconnu.

« Ce que je voulais dire, c’est bien sûr que des armes seront nécessaires pour protéger les côtes », a-t-il expliqué à l’AFP, ajoutant qu’il avait confondu cette affaire avec une autre impliquant l’armée. « L’armement est un dossier à part qui est traité par mes collègues du ministère de la Défense », a-t-il dit.

Les 2.800 kilomètres de côtes du Mozambique sont exposées. Des pirates somaliens se sont récemment aventurés dans les eaux territoriales du pays, à proximité d’un site où doit être installée une plateforme gazière offshore.

Or, la marine mozambicaine est dans l’ensemble « vieille et mal entretenue », note Guy Martin.

Ematum, l’entreprise publique de pêche qui a acheté les bateaux, insiste sur le fait qu’elle a pour unique vocation de développer la pêche industrielle et les emplois du secteur.

« Nous n’allons pas faire la police sur la côte. Ce n’est pas notre métier », a déclaré à l’AFP son directeur général Antonio do Rosario.

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CREDIT SUISSE GROUP

VTB Bank

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