« Le désordre climatique est porteur de désordre sécuritaire », a déclaré le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, à l’ouverture de cette conférence intitulée « Climat et Défense: quels enjeux ? ».
« Les sécheresses, les famines, les inondations provoquées par le réchauffement climatique pourraient constituer l’un des facteurs majeurs de déclenchement des conflits pour les générations à venir », a-t-il mis en garde.
Ce réchauffement rendra « plus rares les ressources vitales que sont la nourriture et l’eau » et donc plus crucial encore le contrôle des terres arables, a souligné le ministre, qui présidera la conférence COP21 sur le climat à Paris en décembre. La préservation des ressources halieutiques est aussi devenue un enjeu majeur de sécurité.
Ces changements « provoqueront (aussi) des départs forcés massifs » de populations, s’il est poursuivi, dans les pays exposés notamment à la montée des océans, avec des « dizaines ou des centaines de millions de +déplacés climatiques+ » en perspective, selon lui.
Les scientifiques n’ont pas pour l’heure trouvé de « modèles théoriques » expliquant comment de tels dérèglements peuvent conduire à des conflits.
« Soyons prudents, mais il me semble assez manifeste que le changement climatique et les phénomènes climatiques extrêmes qui se multiplient jouent au minimum un facteur aggravant et parfois déclencheur de conflits », a souligné Nicolas Hulot, envoyé spécial du président français François Hollande pour la protection de la planète.
« Le changement accroît la pression sur les ressources naturelles, il ajoute de la rareté à la rareté et plus la rareté s’exprime et plus la compétition est exacerbée », a relevé l’écologiste.
Il a pour conséquence la recherche et l’ouverture de nouvelles voies maritimes, comme celle de l’Arctique dans le Grand Nord, qui constituent autant d’enjeux militaires, notamment dans la course aux hydrocarbures.
M. Hulot s’est inquiété d’une risque « réel de militarisation de ces espaces fragiles jusqu’ici épargnés par notre cupidité » et a appelé à « renoncer aux énergies fossiles pour (se tourner vers) les énergies renouvelables, inépuisables et à terme gratuites » que ce sont le vent, le soleil ou la biomasse.
Il devient « indispensable d’anticiper les impacts du réchauffement climatique sur le plan sécuritaire », ont souligné plusieurs participants, dont M. Fabius, même si des pays comme la France ont déjà intégré le climat dans leur politique de défense.
Rappelant que le lac Tchad avait perdu 90% de sa surface, ce qui constitue une source de tension dans la région, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a invité à « dresser une nouvelle cartographie des risques associés aux changements climatiques ».
Le secteur de la défense doit aussi « prendre sa juste part dans l’effort mondial de lutte contre le réchauffement (…) à travers le recours aux énergies renouvelables, la certification écologique des bâtiments, la dépollution ou le recyclage des déchets », a souligné M. Fabius.
Le chef d’état-major des armées françaises, le général de Pierre de Villiers, a assuré que l’armée partageait ce « même attachement à la planète », assurant que des efforts étaient aussi faits sur les matériels, la consommation d’énergie, pour rendre les armées plus propres.