Les pays chasseurs de baleines torpillent une proposition de sanctuaire

Une proposition présentée par l’Argentine, le Brésil, le Gabon, l’Afrique du Sud et l’Uruguay, qui devait recueillir une majorité de 75% pour être adoptée, n’a obtenu que 38 « oui » contre 24 « non », lors d’une réunion de la Commission baleinière internationale (CBI), au grand dam des défenseurs de l’environnement.

Les principaux opposants à la proposition ont été les pays chasseurs de baleines –Japon, Norvège, Islande –, qui ont obtenu le soutien d’un certain nombre de pays d’Afrique, d’Asie et de petites îles.

« Vu tous les problèmes auxquels sont confrontées les populations de baleines après avoir été dévastées par la chasse à des fins commerciales, il est clair qu’elles ont besoin d’une zone protégée dans laquelle elles seront en mesure, non pas simplement de survivre, mais de se reconstituer et de prospérer », a déclaré John Frizell, de Greenpeace.

« Le plus décevant, c’est que ces efforts soient au bout du compte sapés par des pays membres de la CBI situés à des milliers de kilomètres, même pas dans l’hémisphère sud et même, pour certains, à l’autre bout du monde », a-t-il dit.

La proposition de sanctuaire, défendue par des pays dépendant du tourisme d’observation des baleines, a été rejetée à toutes les réunions de la CBI depuis qu’elle a été faite pour la première fois en 2001.

« Il est décevant que la proposition de sanctuaire dans l’Atlantique sud ait à nouveau été rejetée par des pays qui ont tout intérêt à tuer des baleines pour faire du profit », a déclaré Kitty Block, vice-présidente de l’organisation Humane Society International.

« Les baleines ont perdu, tout comme les communautés locales, qui ont tant à gagner de l’explosion de l’écotourisme, comme l’observation durable des baleines », a-t-elle ajouté.

La proposition visait à créer un sanctuaire de 20 millions de kilomètres carrés dans l’Atlantique sud qui abrite 51 espèces de cétacés.

Selon ses partisans, 71% des quelque trois millions de baleines tuées dans le monde entre 1900 et 1999 ont été capturées dans l’hémisphère sud.

– opposition du Japon –

Les espèces les plus chassées ont été le rorqual commun, le cachalot, la baleine bleue, la baleine à bosse, le rorqual boréal et la baleine de Minke, précisent-ils.

De nombreuses populations sont toujours en train de se reconstituer grâce à un moratoire sur la chasse –sauf celle de subsistance–, entré en vigueur il y a trente ans.

La proposition stipulait qu’un sanctuaire devrait « promouvoir la biodiversité, la protection et l’utilisation non létale des ressources baleinières dans l’océan Atlantique sud ».

Mais le Japon, accusé de se livrer tous les ans à la chasse commerciale sous couvert de recherche scientifique, a exprimé sa vive opposition.

Selon lui, les stocks de certaines espèces se sont suffisamment reconstitués pour qu’elles puissent être à nouveau chassées, et exclure toutes les baleines de la chasse ne se justifie pas d’un point de vue environnemental.

« L’utilisation durable des ressources marines vivantes, dont les baleines (…) est parfaitement compatible avec la protection de l’environnement », a affirmé le commissaire japonais de la CBI lundi aux délégués.

Deux sanctuaires existent actuellement, l’un dans l’océan Indien, l’autre dans l’océan Austral ou Antarctique où chasse le Japon.

Autre dossier au menu de cette réunion de cinq jours ouverte lundi: une proposition de la Nouvelle-Zélande et de l’Australie prévoyant d’examiner de plus près les programmes de pêche « à des fins scientifiques », comme ceux que le Japon affirme mener.

Les représentants des pays s’efforcent de peaufiner la formulation d’un document consensuel allant dans ce sens –faute de quoi la proposition sera soumise au vote, peut-être mercredi.

Le commissaire brésilien Hermano Ribeiro a souligné lundi auprès de l’AFP qu’un sanctuaire fournirait « une certaine sécurité » aux cétacés dans l’Atlantique sud.

« On capture et tue des baleines (dans l’océan Austral). Qui peut nous dire que si la population d’une espèce particulière commence à diminuer, les chasseurs de baleines au nom de la science ne viendront pas dans l’Atlantique sud ? », demande-t-il. « Nous voulons éviter cela ».

Voir les autres articles de la catégorie

ACTUALITÉS

Le Bénin et la mer

Découvrez GRATUITEMENT le numéro spécial consacré par Marine & Océans au Bénin et la mer

N° 282 en lecture gratuite

Marine & Océans vous offre exceptionnellement le numéro 282 consacré à la mission Jeanne d’Arc 2024 :
  • Une immersion dans la phase opérationnelle de la formation des officiers-élèves de l’École navale,
  • La découverte des principales escales du PHA Tonnerre et de la frégate Guépratte aux Amériques… et de leurs enjeux.
Accédez gratuitement à la version augmentée du numéro 282 réalisé en partenariat avec le Centre d’études stratégiques de la Marine et lÉcole navale

OCÉAN D'HISTOIRES

« Océan d’histoires », la nouvelle web série coanimée avec Bertrand de Lesquen, directeur du magazine Marine & Océans, à voir sur parismatch.com et sur le site de Marine & Océans en partenariat avec GTT, donne la parole à des témoins, experts ou personnalités qui confient leurs regards, leurs observations, leurs anecdotes sur ce « monde du silence » qui n’en est pas un.