Les prix du blé étaient mercredi quasiment inchangés par rapport à la semaine dernière, autour de 335 euros la tonne sur Euronext vers 14H00 GMT. Ils baissaient légèrement en pré-ouverture à la Bourse de Chicago, à 8,3175 dollars le boisseau pour le blé d’hiver de variété SRW.
« Depuis une semaine, on voit que le marché s’essouffle », avec un blé américain trop cher à l’export et un ralentissement des affaires en Europe, face à un « blé russe très compétitif », indique Sébastien Poncelet, du cabinet Agritel.
– Le Mississippi au plus bas –
« On a le sentiment que le marché sous-intègre le risque. Car le risque est toujours là: sur le devenir du corridor maritime (qui permet de sortir des céréales d’Ukraine), toujours très critiqué par la Russie, et sur les aléas météo liés à la sécheresse aux Etats-Unis et en Argentine ou aux inondations en Australie », ajoute-t-il.
La Bourse de Rosario a révisé à la baisse son estimation de production annuelle de blé en Argentine, à 15 millions de tonnes (contre 22 millions l’an dernier). Ce serait un plus bas depuis sept ans.
Aux Etats-Unis, quatrième exportateur mondial de blé, les grandes plaines du Kansas ou de l’Oklahoma manquent encore cruellement d’eau.
Selon le Drought Monitor, la carte actualisée en temps réel du Centre national de gestion de la sécheresse, 82% de la surface du pays étaient soumis, la semaine dernière, à des conditions allant d' »anormalement sèches » à celles d’une « sécheresse exceptionnelle », un record depuis que les données ont commencé à être compilées, début 2001.
Alors que les stocks restent élevés, « le marché du blé a commencé à décrocher le 10 octobre » mais cela ne suffit pas pour relancer les exportations américaines. « On aimerait bien vendre notre blé, mais ce n’est pas possible, parce qu’on n’est pas compétitifs », explique Steve Erdman, de EFG Group.
En cause notamment: les coûts de transport par barges, qui acheminent les grains des grandes plaines vers les ports et ont doublé depuis l’an dernier à la même époque.
Un coût directement lié au niveau très bas du Mississippi, ce qui joue sur les volumes de céréales livrés au Golfe du Mexique, « alors que c’est l’époque de l’année où l’on voit habituellement le plus de mouvement parce qu’on est au pic de la récolte », souligne Jason Roose, de US Commodities.
– L’inconnue du corridor –
Si les prévisions de production mondiale de céréales (hors riz) restent stables pour 2022-23, l’International Grain Council (IGC) voit toutefois celle du maïs reculer de 2 millions de tonnes sur un mois à 1,166 milliard de tonnes (-4% par rapport à l’an dernier) – un repli « compensé par une hausse des estimations pour l’orge ».
Cette baisse est essentiellement due à la mauvaise récolte de grain jaune en Europe, où les importations sont en forte hausse: 9 millions de tonnes en fin de semaine dernière, selon les données de la Commission européenne, contre 4,3 millions l’an dernier à la même période.
Malgré la sécheresse, les rendements pour le maïs américain restent bons, avec des conditions de culture meilleures dans l’est de la Corn Belt, en partie du fait de l’utilisation de semences OGM, dotées de caractéristiques génétiques qui leur permettent de « résister à la chaleur et produire quand même des rendements impressionnants », pour Steve Erdman.
Dans ce contexte, les prix du maïs résistent mieux que ceux du blé, même s’ils cédaient un peu de terrain à Chicago mercredi, à 6,8525 dollars le boisseau (environ 25 kg).
« Dans les mois qui viennent, le Brésil aura fini d’écouler sa récolte et on se tournera vers le maïs ukrainien: l’évolution de la situation en mer Noire sera déterminante », estime Sébastien Poncelet.
« On est encore très dépendants du corridor et on est dans l’inconnu », relève-t-il, alors que les chargements dans les ports ukrainiens ralentissent du fait de la lenteur des contrôles en mer, et que le dispositif actuel arrive à échéance le 19 novembre.
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