Le dépaysement de cette enquête, à la suite de violences d’une ampleur inédite depuis la quasi-guerre civile des années 1980 et qui ont fait 14 morts, était réclamé par les militants indépendantistes mais avait été refusé par la justice de Nouméa.
« Les circonstances locales, et notamment l’exécution en dehors de la Nouvelle-Calédonie des mesures de sûreté en cours », une référence au placement en détention provisoire dans l’Hexagone de plusieurs indépendantistes, « justifient le renvoi de la procédure », souligne la décision.
A partir du 13 mai, la Nouvelle-Calédonie a été en proie à ces violences en lien avec la réforme du corps électoral, au cours desquelles quatorze personnes, dont deux gendarmes, ont été tuées et des centaines de personnes blessées. Les dégâts matériels sont estimés à au moins 2,2 milliards d’euros.
Une information judiciaire a été ouverte par le parquet de Nouméa pour complicité de tentatives de meurtres, association de malfaiteurs, participation à un groupement formé en vue de la préparation de violences contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens, vols avec arme et destructions par un moyen dangereux, en bande organisée, concernant des faits commis du 12 mai au 19 juin.
Dans le cadre de ces investigations, treize militants indépendantistes appartement à la Cellule de coordination des actions de terrains (CCAT) avaient été mis en examen, et sept d’entre eux avaient été placés en détention provisoire, transférés dans l’Hexagone le 23 juin à bord d’un avion spécialement affrété.
Huit des militants du CCAT avaient réclamé le dépaysement de l’information judiciaire, dénonçant des violations répétées de la présomption d’innocence.
Mais le procureur général de la cour d’appel de Nouméa avait rejeté ces accusations de partialité. « Tout le débat, c’est de savoir si la CCAT est, en totalité ou en partie, une organisation criminelle », avait-il considéré.
Un recours contre la décision de ce procureur général avait été formé, et la chambre criminelle de la Cour de cassation avait été saisie fin octobre par le procureur général Rémy Heitz « face à l’importance des enjeux » et « dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice ».
François Roux, avocat de Christian Tein et avocat historique du FLNKS, a dit mardi soir sa « satisfaction, puisqu’on avait dit depuis le début qu’il y avait trop d’enjeux sur place en Nouvelle-Calédonie », ce qui n’était « pas propice à une instruction du dossier sereine ».
« Cette question est une question de décolonisation (…) Pour nous, nos clients sont des prisonniers politiques et il est temps que ça cesse », a ajouté le conseil.