Paris et Rome s’accordent sur la reprise des chantiers navals de Saint-Nazaire

Au-delà de cette alliance entre chantiers navals, les deux pays ont lancé un projet plus ambitieux, celui de « créer un champion mondial dans le naval », selon M. Macron, en rapprochant Fincantieri et Naval Group (ex-DCNS), géant français de la construction navale militaire.

Pour cela, le président français et le chef du gouvernement italien Paolo Gentiloni, réunis à Lyon, ont décidé de mettre en place un groupe de travail qui va se pencher d’ici à l’été 2018 sur la faisabilité d’un tel projet présenté comme « très complexe » par l’Elysée.

Naval Group et Fincantieri se sont réjouis dans un communiqué de l’annonce du lancement de ce processus, ajoutant qu’ils joueront « un rôle clé au sein du comité de pilotage qui sera mis en place dans les prochains jours ».

Cette annonce a été faite au lendemain de l’annonce de la prise de contrôle d’Alstom, fleuron du ferroviaire français, par l’allemand Siemens, très critiquée en France.

A Lyon, MM. Macron et Gentiloni ont mis fin à une mini-crise bilatérale initiée par la remise en cause par Paris de l’accord de vente de STX-France à Fincantieri conclu sous la présidence de François Hollande.

Selon le nouvel accord, Fincantieri obtient 50% des chantiers navals de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) auxquels il faut ajouter 1% « prêté » par l’Etat français, qui se réserve le droit de le reprendre si l’Italien ne respecte pas ses engagements pendant une période maximale de douze ans.

Ces engagements portent notamment sur le maintien des emplois, de la charge de travail, des sous-traitants, des activités de recherche de STX.

« Nous pouvons dire aujourd’hui que c’est un accord gagnant-gagnant (…) Nous sommes à 50-50, avec de vraies garanties. Ce n’est pas l’accord du printemps mais nous avons construit les termes d’un accord qui permet à Fincantieri de diriger les destinées de cette entreprise », a déclaré M. Macron. « Après quelques malentendus, nous avons bien travaillé ensemble » et « abouti à une solution », a-t-il ajouté.

« Il s’agit d’un très bon accord », s’est félicité M. Gentiloni, tandis que des sources proches des ministères de l’Economie et du Développement économique faisaient remarquer que « Fincantieri aura la disponibilité directe de 51% du capital et donc le plein contrôle de la gouvernance, ce qui n’était pas le cas dans la configuration précédente ».

Cet accord est « une éclaircie », a déclaré François Janvier, délégué CFE-CGC de STX France, en insistant sur la nécessité de « la transparence d’accès au pacte d’actionnaires ».

Le site de Saint-Nazaire, qui construit des paquebots de croisière, mais aussi des navires militaires, emploie 2.600 salariés et fait travailler environ 5.000 personnes, via des sous-traitants.

– Un ‘champion européen’ –

Paris est confiant sur l’avenir de ce « champion européen » car « industriellement, les deux groupes sont complémentaires. Ils ne fabriquent pas le même genre de bateaux. Et Saint-Nazaire peut profiter de la tendance d’augmentation de la taille des navires ».

Cette vision optimiste est contestée par certains responsables politiques, comme Marine Le Pen (FN), pour laquelle, sur les dossiers Alstom et STX, M. Macron « porte une lourde responsabilité dans l’éviscération de l’industrie française ».

Le feuilleton STX avait commencé en 2016 lorsque STX France, alors seule unité rentable du groupe sud-coréen en difficulté STX Shipbuilding avaient été mis en vente à l’occasion d’un redressement judiciaire.

Fincantieri, contrôlé par l’Etat italien et seul candidat à la reprise, obtient le feu vert du gouvernement de François Hollande. Mais fin mai, Emmanuel Macron, fraîchement élu à l’Elysée, demande de revoir la participation française à la hausse, visant une répartition à 50/50%. Une proposition rejetée par Rome, les Italiens insistant pour détenir 51% du capital et le contrôle du conseil d’administration.

La crise éclate réellement avec la nationalisation « temporaire » fin juillet de STX France par Paris, une décision rarissime destinée à « négocier dans les meilleures conditions », après l’échec des discussions. Les deux pays s’étaient alors fixé l’échéance du 27 septembre pour sortir de la crise.

A Lyon, MM. Macron et Gentiloni ont abordé un autre dossier bilatéral épineux: l’avenir de la ligne de train à grande vitesse Lyon-Turin, financée par l’Union européenne, l’Italie et la France, sur laquelle Paris avait indiqué en juillet vouloir faire une pause.

M. Macron a insisté sur la « spécificité » de ce projet « financé à 40% par l’Union européenne, mais aussi à 35% par l’Italie ».

M. Macron a d’ailleurs avancé son départ de Lyon jeudi matin pour retrouver la chancelière Angela Merkel avant le sommet européen sur le numérique à Tallinn.

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