La lettre de son PDG Jean-Marc Janaillac est partie le 1er avril, deux jours seulement après le deuxième tour des municipales. Dans ce courrier révélé vendredi par l’hebdomadaire spécialisé Le Marin, il demande à la direction de la compagnie la convocation d’une assemblée générale extraordinaire pour révoquer le président du conseil de surveillance Gérard Couturier.
Ce même jour, l’intersyndicale avait mis fin à une grève reconductible, lancée face aux « menaces graves et imminentes » pesant sur l’opérateur historique des lignes entre la Corse et le continent. Au coeur de la période électorale, le groupe Transdev avait finalement garanti à l’Etat qu’il n’enclencherait pas de procédure collective devant le tribunal de commerce, garantie jugée suffisante par les syndicats.
En parallèle, le groupe de transport a donc entamé le processus pour démettre Gérard Couturier, représentant de Transdev, mais « allié objectif » du président du directoire Marc Dufour, selon un syndicaliste.
Transdev (66% du capital de la SNCM, 7 sièges) vise ainsi à retrouver la majorité au conseil de surveillance, où il peut aujourd’hui être mis en minorité par les représentants des salariés et actionnaires salariés (9%, 4 sièges) et l’Etat (25%, 3 sièges).
Pointant du doigt les « divergences persistantes entre l’actionnaire majoritaire et les organes sociaux », son PDG Jean-Marc Janaillac souhaite le remplacer « au plus tard le 25 avril 2014 ». La compagnie proposera pour son remplacement Jérôme Nanty « pour sa bonne connaissance du dossier », selon une source proche de Transdev.
Légalement cependant, la convocation d’une AG doit être votée par le conseil de surveillance de la compagnie. La convocation de cette AG a bien été inscrite à l’ordre du jour du prochain conseil, lundi.
Lors d’une conférence de presse, mercredi, M. Janaillac avait laissé présager cette reprise en main du conseil de surveillance de la compagnie maritime en difficulté : « On est l’actionnaire majoritaire. Aujourd’hui, pour des raisons conjoncturelles, on n’a pas la majorité au conseil de surveillance de la SNCM », regrettait-il.
– Désaccords stratégiques –
« Mais notre souhait – et on y travaille actuellement – c’est que sur ce domaine là, du conseil de surveillance, on revienne à une situation qui soit plus classique. A savoir que l’actionnaire majoritaire puisse avoir la majorité au sein du conseil de surveillance », expliquait le patron du groupe de transport.
Depuis plusieurs mois maintenant, la direction de la SNCM, emmenée par le président du directoire Marc Dufour, s’oppose à son actionnaire principal. Elle a engagée un plan de redressement de la compagnie, plan qui prévoit la suppression d’environ 500 postes (sur 2.600), l’augmentation du temps de travail et le remplacement de quatre navires par des bateaux plus performants.
L’actionnaire majoritaire Transdev n’a jamais caché son scepticisme vis-à-vis de ce plan. Un plan « auquel nous ne croyons pas », a de nouveau répété son PDG mercredi.
Le président de Veolia Antoine Frérot, coactionnaire de Transdev, avait lui qualifier ce plan de « fragile » et la SNCM – qui a par ailleurs été condamné à rembourser 440 millions d’aides publiques jugées illégales par Bruxelles – de « boulet ».
– projets parallèles –
En parallèle au plan à long terme préparer par la direction, Veolia et Transdev avait ainsi préparé leurs propres projets, qui prévoyaient une réduction de voilure bien plus importante pour la compagnie, accompagnée ou non d’un recours au tribunal de commerce.
Après une grève de dix jours début janvier, l’Etat avait finalement tranché en faveur de la direction et permis l’arrêt du mouvement.
Ce énième revirement fait bondir le syndicaliste CFE-CGC Pierre Maupoint de Vandeul, représentant des actionnaires salariés au conseil d’administration: « Les tensions entre Janaillac et le ministère paraissaient résolues avec les engagements des 30 et 31 mars. Manifestement, le PDG de Transdev passe outre et déroule son scénario d’une mise en procédure collective de la SNCM en lieu et place du projet de modernisation qu’ils avaient pourtant validé en septembre 2013! », s’indigne-t-il.
Personne n’était joignable vendredi au cabinet du secrétaire d’Etat aux Transports Frédéric Cuvillier, tout juste nommé, pour donner la position du gouvernement, dont la voix sera capitale lundi.
tlg/mfo/LyS
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