Pêche: des répulsifs acoustiques pour empêcher la capture accidentelle de dauphins

De janvier à avril 2018, « près de 700 échouages de petits cétacés, dauphins communs et marsouins communs, ont été recensés par le Réseau national des échouages » sur les côtes atlantiques, précise à l’AFP Olivier Van Canneyt, biologiste à l’observatoire Pélagis de La Rochelle, qui travaille à la conservation des mammifères et oiseaux marins.

« Dans l’état actuel des examens, on recense au moins 90% de dauphins communs, dont 70% à 80% d’entre eux montrent des lésions compatibles avec une mort par capture accidentelle dans un engin de pêche », souligne le chercheur.

En 2017 déjà, 893 échouages de dauphins avaient été recensés. Et après autopsie 70% d’entre eux présentaient des signes de capture accidentelle: marque de mailles de filets sur le corps, rostre (museau) cassé, nageoire amputée ou asphyxie.

Un bilan trois fois supérieur aux captures accidentelles répertoriées au cours des dix années précédentes, et d’autant plus préoccupant que toutes les carcasses ne sont pas ramenées jusqu’à la côte.

En prenant en compte les courants et d’autres facteurs, « en 2017 nous avions estimé que 3.500 dauphins communs étaient morts dans des filets », rappelle Hélène Peltier, elle aussi chercheuse au laboratoire Pelagis (CNRS/Université de La Rochelle). « Pour l’hiver 2018 on ne sait pas encore précisément, mais j’ai peur que ce soit plus ou moins le même ordre de grandeur. »

Selon les scientifiques, l’hécatombe proviendrait d’une « combinaison de facteurs ». Non seulement le changement climatique mais aussi un changement de distribution des populations de cétacés ces quarante dernières années, confirmé par des campagnes d’observation en mer. « Avant, les mammifères s’observaient surtout en mer du Nord. Il y a eu une migration vers le sud, la Manche, la mer Celtique et le golfe de Gascogne. C’est sans doute lié à l’environnement et aux espèces qu’ils chassent », explique Mme Peltier.

« Le marsouin commun avait disparu entre les années 1970 et 1990, on en voyait un par an. Maintenant on en voit 300 », lance-t-elle.

– Hydrophone et réflecteur –

Face à ce désastre, l’organisation professionnelle Les pêcheurs de Bretagne (LPDB), Pélagis et l’institut scientifique Ifremer se sont de nouveau associés pour tenter de trouver des solutions.

Déjà, entre 2004 et 2009, ils avaient porté plusieurs projets de répulsifs acoustiques, des « pingers ». Un dispositif baptisé « cetasaver » avait même été développé, sans jamais être commercialisé faute de partenaire industriel et de débouchés commerciaux suffisants…

Mais les monceaux de cadavres de l’hiver 2017 ont relancé les initiatives. Les pêcheurs de Bretagne ont notamment testé un pinger déjà présent sur le marché. Trois paires de chalutiers de La Turballe (Loire-Atlantique) ont ainsi effectué 200 passages de chalut, dont la moitié avec des filets équipés de ces répulsifs sonores.

« On a mis trois pingers, on n’a pas pris un seul dauphin », raconte à l’AFP Eric Morice, patron du « Zéphyr ». « En les disposant de façon à bloquer la gueule du chalut, ça a marché. Et on n’a pas eu moins de merlus », assure-t-il.

Les données sont en cours d’analyse mais « on observerait une réduction significative des prises de cétacés », confirme Thomas Rimaud, chargé de mission de l’organisation professionnelle.

En parallèle, le projet Licado (pour Limitation des captures accidentelle de dauphins), porté par les trois entités, espère mettre au point d’ici 2021 différents outils, dont « des pingers qui ne se déclenchent qu’à l’approche d’un dauphin, grâce à un hydrophone qui détecte leurs cris », explique Yves Le Gall, chercheur à l’Ifremer. L’appareil serait aussi doté de réflecteurs à sonar pour renvoyer l’écho-localisation des dauphins et les inciter à s’éloigner en douceur.

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