Les ministres européens de la Pêche sont réunis à Bruxelles depuis lundi pour une réunion marathon consacrée à cet épineux dossier qui divise les Etats membres.
L’Irlande a proposé aux Etats de revoir leur position sur la réforme de la politique commune de la pêche (PCP), censée s’appliquer dès 2014, afin de répondre aux inquiétudes du Parlement, qui se montre très déterminé pour mettre fin à la surpêche dans l’UE.
« Si nous ne pouvons pas nous mettre d’accord, nous n’essaierons plus de trouver un accord sous la présidence irlandaise », dont le mandat s’achève fin juin, a mis en garde le ministre irlandais de la Pêche, Simon Coveney, qui coordonne les discussions.
« Le processus de réforme de la Politique commune de la pêche sera alors réellement compromis », a-t-il ajouté, précisant que ce dossier ne figurait pas au rang des priorités de la Lituanie, qui prendra le relais de la présidence de l’UE en juillet.
« S’il n’y a pas d’accord au Conseil des ministres aujourd’hui, il est difficile de dire quand un accord pourra être conclu », a insisté M. Coveney.
« Ce serait une catastrophe », a-t-il estimé alors que les discussions, « difficiles », se poursuivaient mardi soir. Elles pourraient durer jusqu’à mercredi.
Des divergences subsistent entre défenseurs des ressources halieutiques et les grandes puissances de la pêche comme la France et l’Espagne, qui soutiennent un secteur générant plusieurs dizaines de milliers d’emplois.
Une des pierres d’achoppement porte sur l’interdiction des rejets de poissons, qui devrait être totale, selon le Parlement.
Cette pratique consiste à jeter par-dessus bord les captures non commercialisables. La plupart des poissons ainsi rejetés, qui représentent jusqu’à 25% des prises de l’UE, meurent par la suite.
Si les Etats partagent l’objectif de réduire le gaspillage, plusieurs d’entre eux réclament davantage de souplesse dans son application.
Les pays s’étaient accordés en février sur une exemption autorisant le rejet de 9% des prises en 2014, un taux qui serait ramené à 8% par la suite pour atteindre 7% dans la dernière phase en 2019.
Dans un geste en direction du Parlement, la présidence irlandaise a proposé de ramener ces niveaux à respectivement 7%, 6% puis 5% des prises annuelles d’une flotte, tandis que chaque bateau pourrait rejeter jusqu’à 9% des captures par sortie en mer.
Mais ce taux de 5%, qui pourrait être accepté par le Parlement, est jugé trop bas par plusieurs pays, dont l’Espagne et la France.
Contrairement au Parlement, « les ministres ne se prononcent pas seulement sur une nouvelle orientation pour la politique de la pêche, mais ils devront également la mettre en oeuvre dans leur pays », a expliqué Simon Coveney.
« Un taux zéro est totalement impraticable », a-t-il souligné, en plaidant en faveur d’une réforme « durable », qui soit aussi « applicable et pratique pour l’industrie de la pêche ».
Sans revenir sur la finalité d’une pêche plus durable pour ces dix prochaines années, le ministre français Frédéric Cuvillier a insisté lui aussi sur la nécessité d’aboutir à des dispositifs « praticables » et « simples » pour les rejets notamment.
« La question se pose dans les pêcheries mixtes comme les nôtres. Certains pays n’ont pas cette difficulté » en raison de pêche minotière qu’ils pratiquent, a-t-il précisé lors d’une rencontre avec quelques journalistes.
M. Cuvillier a appelé le Parlement a faire preuve de souplesse. « Des marges de manoeuvre, il y en a, bien sûr, de toutes parts », a-t-il insisté.
Si une position commune peut être dégagée au Conseil, l’objectif est de parvenir à un compromis entre les capitales européennes et le Parlement d’ici à la fin mai.
« En cas d’accord aujourd’hui, je me rendrai au Parlement dès demain pour tenter de finaliser un accord global », a expliqué M. Coveney, se disant « plutôt confiant ».