En Russie, le transfert des détenus après leur condamnation vers leur lieu de réclusion se déroule généralement dans des conditions opaques et plusieurs semaines peuvent s’écouler avant de savoir où ils ont été envoyés.
Mais le fait qu’autant d’opposants emprisonnés sur différents sites soient transférés au même moment est inhabituel.
L’équipe d’Ilia Iachine, condamné fin 2022 à huit ans et demi de prison pour avoir dénoncé des crimes imputés à Moscou en Ukraine, a ainsi annoncé mardi sur Telegram qu’il avait « disparu » de la prison où il purgeait sa peine dans la région de Smolensk. Selon ses proches, il est en route « vers une destination inconnue ».
La veille, l’ONG Mémorial a indiqué qu’Oleg Orlov, condamné à deux ans et demi de prison pour avoir fustigé l’attaque russe contre l’Ukraine, avait lui aussi disparu du centre de détention provisoire de Syzran, dans la région de Samara.
Ksenia Fadeïeva et Lilia Tchanycheva, deux proches du défunt opposant Alexeï Navalny, condamnées respectivement à neuf et à neuf ans et demi d’emprisonnement pour « extrémisme », ont également été extraites de leurs lieux de détention.
Sur X, le mari de Mme Tchanycheva, Almaz Gatine, a indiqué lundi que l’administration de la prison de Berezniki, dans la région de Perm, où elle purgeait sa peine, l’avait informé que son épouse avait quitté cette colonie le 26 juillet, sans pouvoir lui dire où elle se trouvait désormais.
Concernant Ksenia Fadeïeva, son groupe de soutien a affirmé lundi sur Telegram que son avocate avait également été informée de son départ d’une colonie pénitentiaire de la région de Novossibirsk.
Enfin, toujours sur Telegram, le groupe de soutien de l’artiste Alexandra Skotchilenko, condamnée à sept ans de prison pour une action pacifiste, a affirmé qu’elle avait aussi été transférée depuis un centre de détention provisoire à Saint-Pétersbourg, « supposément » vers Moscou.
Certains observateurs de la Russie spéculaient dès lors sur la possibilité qu’un échange de prisonniers impliquant des opposants et des Américains détenus en Russie soit en préparation.
« Il semblerait que nous soyons à l’aube d’un échange très important (et pas qu’avec les Américains) », a relevé sur Telegram la politologue indépendante Tatiana Stanovaïa, qui s’est exilée.
Des ONG s’inquiètent régulièrement des conditions de détention des prisonniers politiques en Russie, où toutes les voix critiques sont réprimées depuis l’attaque de février 2022 contre l’Ukraine.
L’ennemi numéro 1 du Kremlin, Alexeï Navalny, est mort dans des circonstances obscures en février 2024, dans une prison de haute sécurité dans l’Arctique, après avoir été soumis à des conditions de détention de plus en plus éprouvantes.
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