La grève, suivie mercredi à 65% par le personnel navigant, a été reconduite pour ce jeudi, où elle devrait s’étendre au personnel sédentaire, en congés la veille. Six des huit bateaux qui devaient desservir la Corse et le Maghreb — les deux autres sont en hivernage — devraient ainsi de nouveau être immobilisés.
Mercredi, les passagers avaient tous été prévenus par la compagnie, et l’embarquement était alors désert à Marseille, a constaté l’AFP.
Le début de la grève est intervenu après l’annonce mardi par le Premier ministre, dans un courrier au député PS Patrick Mennucci, candidat à la mairie, de 30 millions d’euros d’apport supplémentaire de l’Etat. En contrepartie, il exige toutefois « la mise en place dans des délais désormais rapides des mesures de redressement », soulignant que « cette solution devra être mise en lien avec l’actionnaire majoritaire », Veolia-Transdev.
La CGT Marins, syndicat majoritaire, a immédiatement fustigé un « enfumage électoral ». Son représentant Frédéric Alpozzo a déploré qu’on demande aux salariés de fournir tous les efforts, « sans que l’Etat et les actionnaires respectent leurs engagements industriels ».
Selon le délégué CFE-CGC Maurice Perrin, les déclarations de M. Ayrault « cachent en réalité l’abandon du plan tel qu’il a été voté par l’ensemble des actionnaires ». Ce programme devait permettre d’économiser 70 millions d’euros par an et d’atteindre la rentabilité en deux ans, via la suppression de 500 postes et le renouvellement des navires.
C’est « un revirement important », « une remise en cause du projet industriel bâti par le management, partagé avec les salariés et soumis dernièrement au vote des marins », confirme une source proche du dossier.
Plus de 4.000 clients touchés
Avec l’immobilisation des bateaux, « plus de 4.000 clients (seront) touchés sur les deux premiers jours, pour un coût de près de 1 million d’euros », selon la direction.
Des perturbations touchent aussi la Méridionale, qui détient avec la SNCM la délégation de service public pour les liaisons entre la Corse et Marseille de 2014 à 2023.
La SNCM, en proie à des difficultés de trésorerie et sous le coup d’une double condamnation de Bruxelles à rembourser 440 millions d’euros d’aides jugées illégales, traverse une phase critique.
Au coeur du problème, l’actionnariat. Veolia, qui devait récupérer en direct les 66% détenus par Transdev, coentreprise formée avec la Caisse des dépôts, souhaite se désengager.
Dans ces conditions, le numéro un mondial de l’eau rechigne à apporter les garanties bancaires nécessaires, préférant le scénario du dépôt de bilan. Un scénario catastrophe de nouveau brandi juste avant Noël, l’actionnaire octroyant finalement in extremis un prêt de 13 millions d’euros à la SNCM, indispensable à la poursuite, jusqu’à fin janvier, de son activité.
Actionnariat public d’intérêt général
Pourtant, l’entreprise, loin de son image « sclérosée et vieillotte », est « viable », disent à l’unisson syndicats et direction.
« Veolia et Transdev ne doivent pas avoir droit de vie et de mort sur la SNCM », s’insurge M. Perrin qui regrette que le gouvernement « reporte sine die toute recherche d’un actionnariat futur ».
Les syndicats appellent à la mise en place d’un « actionnariat public d’intérêt général » avec la Caisse des dépôts et les collectivités, aux côtés de l’Etat (25%) et des salariés (9%).
La ville de Marseille a récemment demandé de siéger au conseil de surveillance comme administrateur indépendant. Le conseil général des Bouches-du-Rhône s’est de son côté dit « prêt à entrer au capital de la SNCM », « dans le cadre d’un projet industriel » porté par un acteur privé.
Les holdings d’investissement Alandia et Fin’Active ainsi que deux armateurs, dont les noms n’ont pas été précisés, ont déjà manifesté leur intérêt.
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