Le parquet de la région de Galice, qui avait réclamé entre cinq et douze ans de prison pour les accusés, dont le commandant du pétrolier, ainsi que l’Etat français espèrent ainsi faire reconnaître l’atteinte à l’environnement ayant résulté en 2002 de cette marée noire, l’une des plus graves de l’histoire.
L’Etat espagnol avait déjà déposé un recours similaire devant le Tribunal Suprême, la plus haute juridiction pénale de l’Espagne.
Le Prestige, un pétrolier libérien qui battait pavillon des Bahamas, chargé de 77.000 tonnes de fioul, avait coulé dans l’Atlantique, à 250 kilomètres au large des côtes de Galice, le 19 novembre 2002, après avoir subi une avarie dans la tempête.
Pendant plusieurs semaines, 63.000 tonnes de fioul s’étaient répandues sur les côtes espagnoles, françaises et portugaises.
Le tribunal supérieur de justice de Galice, au terme d’un procès d’un an, a acquitté le 13 novembre les trois accusés : le commandant grec du pétrolier Apostolos Mangouras, le chef mécanicien, grec lui aussi, Nikolaos Argyropoulos, et le directeur de la Marine marchande espagnole de l’époque, José Luis Lopez-Sors, pour les délits d' »atteinte à l’environnement et à des espaces naturels protégés ».
Il a en revanche condamné le commandant à neuf mois de prison pour « désobéissance », celui-ci ayant tardé à accepter que le navire soit remorqué vers le large, comme l’avaient décidé les autorités espagnoles pour essayer de minimiser les dommages à l’environnement.
Le tribunal n’a pas non plus accordé de compensations pour les dégâts causés à l’environnement, alors que plus de quatre milliards d’euros étaient réclamés notamment par les Etats espagnol et français.
La ministre française de la Justice, Christiane Taubira, et le ministre de l’Economie, Pierre Moscovici, ont annoncé vendredi que la France, en se pourvoyant en cassation auprès du Tribunal suprême espagnol, souhaitait « faire reconnaître (…) l’existence d’une infraction pénale d’atteinte à l’environnement en raison des actes commis par le capitaine et l’équipage ».
Le coût entraîné par la marée noire est évalué à 109,7 millions d’euros pour les victimes françaises, dont 67,5 « supportés par l’Etat pour lutter contre la pollution », selon le communiqué des deux ministres.
Le tribunal, soulignent-ils, a jugé qu’il n’y avait pas lieu de se prononcer sur la responsabilité civile des personnes poursuivies, « ce qui prive les victimes, notamment françaises, de la possibilité de voir leur préjudice indemnisé ».
Outre l’Espagne, la marée noire avait touché les côtes de l’Aquitaine, dans le sud-ouest de la France, mais des galettes et des boulettes avaient aussi été retrouvées jusqu’en Bretagne, plus au nord.
Vendredi, le parquet de La Corogne a lui aussi annoncé qu’il déposait un recours en cassation, estimant que « le jugement ne répond pas aux effets de la catastrophe écologique ».
Le parquet, « en tant que défenseur des intérêts sociaux et des demandes des victimes espagnoles et françaises, juge pertinent de soutenir qu’un délit pénal écologique ayant entraîné des dégâts a été commis ».