Cette question a été l’une des plus discutées à la 19e Conférence des parties (COP19) de la CITES, la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées, qui rassemble 183 pays et l’Union européenne.
Le sommet, débuté le 14 novembre et qui s’achève vendredi, pourrait faire entrer des dizaines d’espèces de requins requiem (Carcharhinidae) et de requins-marteaux (Sphynidae) dans l’Annexe II de la Convention limitant strictement le commerce de certaines espèces. Une initiative soutenue par l’Union européenne et une quinzaine de pays, dont le Panama hôte du sommet.
Il s’agit d’espèces qui ne sont pas encore menacées d’extinction mais pourraient le devenir si leur commerce n’était pas étroitement contrôlé. L’Annexe I, elle, interdit complètement le commerce de certaines espèces.
Si la réunion plénière de jeudi donne son feu vert, « il s’agira d’une décision historique car pour la première fois la CITES prendrait position sur un très grand nombre d’espèces de requins qui représentent approximativement 90% du marché », a déclaré à l’AFP la déléguée panaméenne Shirley Binder.
Le marché des ailerons de requin dépasse les 500 millions de dollars par an (483 millions d’euros). Ils peuvent se vendre 1.000 dollars le kilo en Asie de l’Est pour confectionner des soupes très réputées.
– Débat intense –
Avant le vote prévu, un intense débat s’était déroulé trois heures durant, le 17 novembre, au sein d’un comité de la conférence, le Japon et le Pérou proposant d’exclure certaines espèces des mesures de protection –une mesure rejetée à bulletins secrets avant l’approbation des propositions pour renforcer les protection des requins requiem et requins-marteaux.
« Nous espérons que tout soit adopté en plénière », observe Mme Binder.
La plénière doit également voter sur la ratification d’une proposition sur la protection de la raie guitare.
Pendant les discussions du comité, plusieurs délégations dont celle du Panama avaient disposé sur leurs tables des requins en peluche, devenus ensuite une sorte de symbole du sommet.
Des délégués et responsables d’organisations de protection de la nature, observatrices au sommet, se sont montrés confiant dans l’adoption en plénière des résolutions.
« Nous espérons que rien d’extraordinaire n’arrive et que l’intégralité de ces familles de requins soit incluses dans l’Annexe II », a déclaré à l’AFP le délégué chilien Ricardo Saez.
Si les trois propositions sur les requins requiem, requins-marteaux et raies-guitares sont votées, « nous passerions d’un contrôle sur 25% environ du commerce d’ailerons de requins à plus de 90% », avait expliqué à l’AFP au début du sommet Ilaria Di Silvestre, responsable des campagnes européennes pour le Fonds international pour la protection des animaux (IFAW).
– Extinction –
« Nous sommes au milieu d’une très grande crise d’extinction des requins », le « deuxième groupe de vertébrés le plus menacé de la planète », avait alors souligné de son côté Luke Warwick, de la Wildlife Conservation Society.
Au total, les participants au sommet ont étudié 52 propositions pour modifier les niveaux de protection de certaines espèces.
La CITES, en vigueur depuis 1975, fixe les règles du commerce international pour plus de 36.000 espèces sauvages, allant de la délivrance de permis (plus d’un million de transactions autorisées par an) jusqu’à l’interdiction totale.
Organisé tous les deux ou trois ans, le sommet s’est déroulé cette année dans l’ombre et sous l’influence de deux autres conférences de l’ONU, elles-aussi cruciales pour l’avenir des êtres vivants sur la planète: la COP27 sur le climat qui s’est achevée dimanche en Egypte et la COP15 sur la sauvegarde de la biodiversité en décembre à Montréal.
En 2019 à Genève, la CITES avait renforcé la protection des girafes, quasi prohibé l’achat d’éléphants par les zoos, maintenu l’interdiction à l’Afrique australe de vendre ses stocks d’ivoire, et inscrit 18 requins à son Annexe II, celles des espèces dont le commerce est strictement limité.