Représentant 70% de la surface de la planète, l’océan connecte les hommes, fournit nature et oxygène et régule notre climat en absorbant près d’un quart du CO2 produit. Sa bonne santé conditionne la nôtre et il est pourtant le grand absent des politiques mondiales. La crise sanitaire que nous vivons avec le Covid-19 a justement mis en danger notre santé et la vulnérabilité de l’espèce humaine. Cette crise est un signal d’alarme soulignant l’impact des actions humaines sur la nature. Notre course à la croissance, avec comme seul indicateur le PIB, ne fait qu’accroître le réchauffement climatique, la destruction des habitats naturels, les pollutions, l’effondrement de la biodiversité… Cette crise accentue les inégalités et démontre à quel point nous sommes fragiles. Aujourd’hui, la planète paie le prix fort mais, in fine, c’est l’humain qui scie la branche sur laquelle il vit. L’océan, garant d’un certain équilibre, doit impérativement être au cœur de nos attentions si nous voulons préserver l’homme et la Terre. Un changement de perspective est nécessaire et cette crise en sera, je l’espère, le point de départ. Le Covid-19 agit comme un véritable électrochoc mondial avec des conséquences sociales, économiques et sociétales. Choc qui nous amène à poser les bonnes questions, à réfléchir à nos comportements, nos modes de vie. Le confinement a apporté une forme de répit à la nature, une meilleure qualité de l’air. Nous avons tous vu les vidéos de baleines nageant près du littoral, de sangliers ou d’autres animaux sauvages se promenant dans les villes. Hélas, quelques semaines à peine après le déconfinement de la France, la pollution est remontée, le chant des oiseaux a, de nouveau, été noyé dans le vacarme citadin. Le répit aura été de courte durée. Néanmoins, cette crise a été l’occasion d’une prise de conscience de la fragilité de l’homme sur Terre et je suis impressionné par la mobilisation inédite qu’elle a suscitée.
Créativité, solidarité et adaptabilité
On y a trouvé des réponses draconiennes qui n’auraient pu être imaginées il y a seulement quelques mois : confinement international, fermeture des frontières… Le monde est en état d’alerte et c’est tout notre mode de vie qui est remis en cause : remise en cause de dogmes économiques, mobilisation de milliards pour aider l’économie et favoriser la recherche (trop souvent mise de côté), alors que l’austérité budgétaire était jusqu’à présent la règle. Nous prenons conscience de la valeur de la vie qui prime sur le marchand. J’ai été frappé par l’incroyable créativité des citoyens. Des initiatives multiples d’entraide, de solidarité se sont développées. Les soignants ont fait preuve d’abnégation et de créativité dans un dénuement de moyens. On a vu de nombreuses entreprises s’adapter. L’innovation et l’agilité ont été les maîtres mots. Les plus résilientes sont celles dont la « raison d’être » est un axe structurant de l’entreprise, leur « utilité » à la société venant légitimer leur action. Face à cette menace existentielle, tous ces acteurs – toute la société d’ailleurs – a fait preuve de courage exceptionnel et a démontré une capacité d’adaptation jamais vue auparavant. Cette crise sanitaire et la crise sociale qui s’en suit sont un « crash test ». Face au défi du réchauffement climatique et son accélération, serons-nous capables de nous adapter, de prendre les décisions radicales qui s’imposent, d’entreprendre le changement systémique nécessaire ? La prise de conscience serait-elle le point de basculement pour tendre vers un monde nouveau ? Serons-nous capables d’inventer un capitalisme responsable, plus humain et résilient, prenant en compte la planète et ceux qu’elle héberge ?
Vers un monde nouveau lié à l’océan
Je crois aux conséquences positives de cette crise qui aura modifié les comportements dans tous les domaines mais surtout, je l’espère, d’un point de vue environnemental. L’état de la planète est critique et nous devons agir pour sa préservation avec la même détermination et courage que nous avons démontré face au Covid-19. L’émergence de maladies infectieuses correspond à notre emprise grandissante sur les milieux naturels. La consommation effrénée des ressources avec la déforestation, la pêche illégale, et les effets de la mondialisation avec la pollution plastique, le dérèglement climatique, engendrent un déséquilibre des écosystèmes, garants d’un certain équilibre. L’impact des actions humaines favorisent alors l’émergence de virus comme l’explique de nombreux scientifiques éminents. Nous faisons parti d’un écosystème que nous avons fragilisé et qui révèle ses points de ruptures de plus en plus douloureusement. L’océan, source précieuse de solutions pour la vie humaine, peut nous sauver à condition qu’il soit lui-même en bon état de santé. L’océan, notre assurance-vie, doit avoir une place majeure dans le monde d’après. Notre équilibre climatique dépend de l’océan, principal régulateur du climat. Nous devons impérativement poursuivre et renforcer la recherche océanique, s’attaquer aux problèmes qui nous menacent. Prenons pour exemple la montée du niveau de la mer. Si nous n’agissons pas maintenant, nombreuses seront les villes qui seront noyées, mettant dans la difficulté des populations entières. 150 millions de personnes vivront en dessous du niveau de la mer d’ici 2050. Le recul des terres favorisera aussi une concentration démographique insoutenable. Seul un changement systémique peut atténuer le réchauffement climatique et la montée des eaux. Agissons aujourd’hui ! Je crois en la capacité de l’homme à relever le défi. Grâce à l’innovation, beaucoup de solutions existent déjà et d’autres sont en cours d’élaboration. En créant la fondation Pure Ocean, mon défi est de financer des projets de recherche innovants au service de la biodiversité marine, fragile mais nécessaire à la bonne santé de la planète. Nous soutenons, par exemple, un projet d’analyse des côtes par satellite afin d’observer et de mieux prédire les changements pour protéger les littoraux qui hébergent une riche et complexe biodiversité. Un projet d’innovation écologique étudie également la capacité des éponges marines à filtrer et à détruire les micro-plastiques, fléau pour l’océan. S’engager avec Pure Ocean, c’est devenir acteur du changement en soutenant l’innovation.
Sécurité alimentaire et solutions pour la santé
« Plus de trois milliards de personnes dépendent de la biodiversité marine et côtière pour leur subsistance » : en tant qu’entrepreneur dans l’industrie des produits de la mer, je connais les différents défis que nous devons affronter. Il faut impérativement déployer des moyens efficaces pour lutter contre la pêche illégale, préserver les pêches locales dont de nombreuses communautés dépendent ou encore multiplier les aires marines protégées. Il faut de plus en plus impliquer les communautés locales aux grandes discussions sur l’océan, étant les premières concernées et victimes des inégalités socio-environnementales. Protéger l’océan c’est garantir notre sécurité alimentaire. Lorsque nous pensons aux risques pour la santé publique, nous ne pensons pas à l’océan comme facteur. Pourtant, des chercheurs et scientifiques s’inspirent de l’océan pour trouver des solutions médicales (traitements, matériaux, etc.). La recherche scientifique et l’approche biomimétique en particulier (qui s’inspire de la nature), apportent des résultats concrets. Des organismes découverts dans les profondeurs extrêmes sont d’ailleurs utilisés pour accélérer la détection de Covid-19. C’est en réalité l’environnement qui conditionne notre humanité et nous fournit des solutions que nous devons déceler. Protéger l’océan c’est garantir notre avenir. En somme, nos vies sont intimement liées à l’océan. Cette crise sanitaire est un bouleversement mais elle doit être l’occasion de nous faire réfléchir sur l’après, et surtout, agir. J’aimerais retrouver ce même élan de solidarité dans le monde d’après, ce même courage et cette même volonté qui nous aideront à traverser la crise climatique, dévastatrice si nous n’agissons pas rapidement. Lutter contre le coronavirus ou lutter contre la destruction de la planète est un même combat puisque nos vies en dépendent. L’océan est l’avenir de l’humanité, mettons-le au cœur de ce monde d’après qui commence dès aujourd’hui.