Le jeudi 8 février 2024, l’Académie de marine et la société Soper récompenseront pour la 3ème édition du Prix TEM, l’association SCLCMT pour leurs actions menées en faveur du développement de navires de commerce à propulsion vélique ainsi que la sensibilisation des chargeurs et transporteurs aux enjeux d’un transport maritime bas-carbone pour la transition énergétique maritime.
Aujourd’hui, 90% du fret est assuré par la mer. Il est à l’origine de 3% des émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) dans le monde. Le volume de marchandises transporté va continuer d’augmenter d’ici 2050. Selon l’OMI (Organisation Maritime International), sans changement vers un système de propulsion plus respectueux de l’environnement, il pourrait être responsable de 15,6% des GES, soit une augmentation de plus de 60% sur les 30 prochaines années. En vue de réduire cette tendance, les Etats membres de l’OMI ont adopté la « Stratégie de 2023 » concernant la réduction des GES provenant des navires. Elle a pour ambition de réduire les émissions de CO2 pour l’ensemble des transports maritimes internationaux, d’au moins 40 % d’ici à 2030 par rapport à 2008, et atteindre l’objectif de zéro émission nette de GES avant ou vers 2050.
Dans l’idée de répondre à la stratégie de l’OMI, France Supply Chain et l’Association des Utilisateurs de Transport de Fret (AUTF) ont constaté dès janvier 2022, que les offres pour décarboner le transport maritime étaient peu disponibles. Ils ont dû faire face à des obstacles majeurs : incertitude sur le prix du transport bas-carbone, traçabilité des nouveaux carburants, disponibilité des carburants alternatifs et absence de solutions industrielles. Ne trouvant pas de réponse à leurs besoins sur le marché, ils ont souhaité s’unir en créant l’association SCLCMT pour promouvoir des solutions en rupture leur permettant d’opérer une vraie transition énergétique de la supply chain et du shipping, basée sur la sobriété énergétique.
De cette alliance, regroupant déjà une douzaine de chargeurs, est né le projet de mettre à l’eau, si possible dès 2025, des navires dont les émissions de CO2 seraient 50% inférieures à celles des transporteurs conventionnels. L’idée : concevoir des porte-containers hors normes, majoritairement propulsés par la force du vent, alliant technologie et sobriété énergétique, grâce au développement de nouvelles structures aérodynamiques, de technologies de récupération d’énergie, d’outils d’optimisation de l’utilisation du vent et de carburants alternatifs.
Différentes routes maritimes sont alors étudiées pour répondre aux besoins des chargeurs. Chacune d’elles possède son propre collège dans l’association, permettant d’assurer la confidentialité et l’efficacité des travaux :
• Collège 1, route nord : Anvers, Le Havre, Tioga (Philadelphie), Charleston ;
• Collège 2, route sud : Gênes, Fos, Valence, Tioga (Philadelphie) ;
• Collège 3 : Mer Baltique, Amérique du Nord ;
• Collège 4 : Europe, Asie ;
• Collège 5 : Europe, Amérique du Sud via l’Afrique. Un objectif commun à toutes les liaisons : réduire de 50% les émissions de CO2 grâce à l’énergie du vent et à une vitesse réduite comprise entre 11 et 13 nœuds (20 à 24 km/h).
Avec ce projet, la coalition s’intéresse également à la notion de juste prix pour maintenir une compétitivité économique, en trouvant un équilibre entre le coût et les impacts sociaux et écologiques. En s’engageant sur 10 ans auprès des opérateurs de navires, les chargeurs de l’alliance peuvent ainsi compter sur un coût de transport stable sur les années à venir, malgré un contexte versatile. C’est aussi et surtout grâce à ces commandes de long terme et la mise en place de binômes « Chargeurs – Transporteurs » que les armateurs peuvent rapidement lancer la production de ces navires innovants et répondant aux besoins de la décarbonation du transport maritime.
Cette démarche se concrétise en 2022 lorsque le groupement lance un premier appel à projets pour la construction de 10 navires porte-containers, équipés d’ailes rigides et d’une propulsion dual fuel diesel-méthanol. Ces 10 navires devront être affectés à parts égales à la route Atlantique nord (Anvers, Le Havre, Tioga, Charleston) et à la route Atlantique sud (Gênes, Fos, Valence, Tioga). Leur exploitation sur ces lignes transatlantiques permettra une réduction du bilan carbone de 50% environ par rapport aux services existants. L’entreprise ayant remportée l’appel à projet a été invitée à négocier et conclure les contrats de transport de long terme avec chacun des chargeurs de la coalition. Dès que le nombre de contrats signés par l’armateur et les chargeurs atteindra le seuil de rentabilité du service, la construction des 10 navires pourra commencer.
Se regrouper pour faire bouger les lignes et contribuer à atteindre les objectifs environnementaux mondiaux en décarbonant la supply chain et le shipping, telle est l’idée de l’association Shipper Coalision for a Low Carbon Maritime Transport. Elle préfigure ce que l’exigence de certains chargeurs agissant de conserve peut apporter à la décarbonation du transport maritime.
C’est cette relation très singulière et fructueuse, entre chargeurs et armateurs, que l’édition 2023 du Prix TEM a souhaité récompenser.
Source : SOPER/Académie de Marine/SCLCMT.
Crédits photo : SOPER/Académie de Marine/SCLCMT.