Etat d’urgence aux Maldives, sur fond de crise politique

Le déclenchement de l’état d’urgence vient renforcer les pouvoirs déjà très vastes des forces de sécurité pour arrêter et maintenir en détention des suspects, et intervient alors que la Cour suprême et le gouvernement sont dans un rapport de force tendu.

Le président des Maldives a refusé de libérer des prisonniers politiques comme le lui ordonnait la Cour suprême, et a mis en garde contre toute tentative de destitution ou d’arrestation le concernant.

Jeudi, la Cour avait cassé les condamnations pour « terrorisme, corruption, détournement de fonds et trahison » en 2015 de neuf opposants, dont celle de l’ancien président Mohamed Nasheed, qui vit en exil au Royaume-Uni.

Cette intervention de la Cour suprême représente un revers majeur pour le président Abdulla Yameen et ouvre la voie au retour sur le territoire et à une candidature à la présidentielle de son grand rival Nasheed, qu’il avait battu dans des circonstances controversées en 2013.

M. Shukoor a lu la déclaration décrétant l’état d’urgence dans une allocution télévisée, après que le président Yameen eut envoyé trois lettres aux juges, leur demandant de revenir sur leur décision.

« La raison de cette déclaration est que la décision de la Cour suprême entrave le fonctionnement du gouvernement », a déclaré M. Shukoor.

Abdulla Yameen avait déjà décrété un état d’urgence en novembre 2015, après une tentative d’assassinat présumée le visant.

Le président est tenu d’informer le Parlement de toute déclaration de l’état d’urgence dans un délai de deux jours, selon des responsables, mais l’assemblée législative du pays a été suspendue pour une durée indéterminée par les autorités.

La Cour avait également ordonné jeudi la réintégration de douze députés démis de leurs mandats pour avoir fait défection du parti de M. Yameen. Cette décision permet théoriquement à l’opposition de retrouver la majorité absolue au Majlis, le parlement de l’archipel qui compte 85 sièges, et lui donnerait le pouvoir de renverser le gouvernement et le président.

Pour la députée de l’opposition Eva Abdulla, l’état d’urgence montre que le régime est sous pression.

« C’est un acte désespéré. Cela montre qu’il (Abdulla Yameen) a tout perdu: la confiance du peuple, du Parlement, des autres institutions et des cours des justice », a déclaré l’élue sur Twitter.

L’opposition a appelé la communauté internationale à faire pression sur le président Yameen pour qu’il respecte la décision de la Cour et mette un terme à la crise politique.

De leur côté, les Etats-Unis ont appelé lundi le gouvernement des Maldives au « respect des institutions démocratiques ».

« Le gouvernement et l’armée des Maldives doivent respecter le droit, la liberté d’expression et les institutions démocratiques. Le monde vous regarde », a déclaré dans un tweet le Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche.

La répression menée contre l’opposition par le président Yameen ces dernières années a terni l’image paradisiaque de ce petit archipel comptant un peu plus de 400.000 habitants, haut-lieu du tourisme de luxe.

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