Chaque année depuis 2011, la New economics foundation (Nef) et Ocean2012, une alliance d’ONG, calculent, pour chaque pays de l’Union européenne, le jour à partir duquel il devient dépendant des importations et de la pêche menée hors des eaux européennes. Une façon pour ces organisations d’alerter sur le niveau de consommation « insoutenable » de l’Europe au regard de l’état de ses réserves de poissons.
Ce « jour de dépendance », purement symbolique, est fixé en faisant le rapport entre la production d’un pays (captures des bateaux de ce pays dans les eaux européennes et aquaculture) et sa consommation.
La France dépendrait ainsi de poissons pêchés hors des eaux européennes pour assurer 62% de sa consommation de poissons. Traduit en jours pour 2013, la France aurait ainsi « virtuellement » consommé les poissons capturés en Europe par les bateaux français dès ce vendredi et commence à dépendre de pêche plus lointaine à partir de samedi, selon les associations.
Ce jour était intervenu le 21 mai en 2012, le 13 juin en 2011 et en septembre en 1990: signe que la « dépendance » de la France s’accroît année après année, à la fois en raison d’une augmentation de la consommation et d’un épuisement des réserves, selon le rapport.
A l’échelle de l’Europe des 27, la dépendance commencera le 8 juillet, ce qui signifie que quasiment un poisson sur deux consommé dans l’UE est pêché hors des eaux communautaires.
Consommation doublée en dix ans
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Pour le Comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM), ce « jour de dépendance » est une « imposture » car il donne l’impression que « les pêcheurs font n’importe quoi ».
La part de plus en plus importante de produits non européens sur les étals français s’explique moins par la surexploitation et l’épuisement des réserves que par une hausse continue de la consommation de produits de la mer des Français, affirme à l’AFP son directeur général Hubert Carré.
« En dix ans, on a quasiment doublé la consommation », passée de 17 à 34 kg environ par an et par personne, fait-il valoir. La pêche française couvre 15% de la consommation du pays, et 50% si on écarte la consommation de deux produits phare importés, le saumon (Norvège et Ecosse) et les crevettes (Madagascar et Asie), assure-t-il.
La consommation moyenne de poissons en Europe est de 22,1 kg par an et par personne, contre 18,4 kg à l’échelle mondiale, soulignent les ONG. Seuls deux pays européens ont maintenu un niveau stable entre 1961 et 2005 — Portugal et Royaume Uni — mais « tous les autres ont accru leur consommation », ajoutent-elles.
« Environ les deux-tiers des stocks de poissons européens sont surexploités, ce qui signifie qu’ils fournissent beaucoup moins de poissons que si on leur permettait de se restaurer », selon leur rapport. Les eaux européennes peuvent « fournir à long terme des poissons et des emplois, mais seulement si ces ressources de pêche sont gérées de façon durable », ajoute le document.
La réforme de la pêche actuellement discutée au niveau européen pour « verdir » cette activité « est une occasion majeure pour restaurer ces stocks et réduire notre dépendance aux poissons non européens », indique à l’AFP Aniol Esteban, responsable environnement à la Nef et principal auteur du rapport.