Ces négociations visant à interdire les subventions facilitant la surpêche sont vieilles de 20 ans, mais la directrice de l’Organisation mondiale du commerce, Ngozi Okonjo-Iweala, qui a pris ses fonctions en mars, vise un accord lors de la prochaine réunion ministérielle de l’organisation, qui se déroule du 30 novembre au 3 décembre à Genève.
« Les yeux du monde sont vraiment tournés vers nous », a-t-elle déclaré lors d’une réunion à l’OMC, au cours de laquelle le président des négociations sur la pêche, l’ambassadeur colombien Santiago Wills, a présenté le nouveau projet de texte.
Dès mardi, ce texte sera discuté article par article par les membres de l’OMC, dans l’espoir d’aboutir à une version consolidée quelques jours avant la réunion ministérielle.
« Le temps presse et je pense que ce texte reflète une étape très importante vers un résultat final », a estimé Mme Okonjo-Iweala.
« Je vois vraiment un rééquilibrage significatif des dispositions, y compris celles relatives au traitement spécial et différencié, tout en maintenant, dans le même temps, le niveau d’ambition », a-t-elle affirmé.
Les négociations sur la surpêche à l’OMC visent à éliminer les subventions qui contribuent à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée et à interdire certaines formes de subventions. Les modalités du traitement des pays en développement constituent la principale pierre d’achoppement des discussions.
– Exemptions pour certains pays –
Les pays développés jugent plutôt d’un bon oeil que les pays les plus pauvres puissent bénéficier de flexibilité, mais ils souhaitent que les pays en développement qui possèdent de véritables armadas de pêche, comme la Chine, ne jouissent d’aucun régime d’exception.
D’autant qu’à l’OMC, ce sont les pays qui s’autodéclarent « pays en développement ».
A cet égard, le projet de texte révisé « fait un grand pas dans la direction souhaitée » par les pays en développement et les plus pauvres en proposant un système d’exemptions, a affirmé M. Wills en conférence de presse.
Les pays les moins avancés (PMA) seraient, selon le projet de texte, exemptés de suivre les règles de l’OMC concernant les subventions contribuant à la surcapacité et à la surpêche, tout comme les activités de pêche artisanale dans la zone des 12 miles marins (de la côte).
Les pays en développement dont le volume de pêche ne dépasserait pas le seuil des 0,7% le seraient également. Quant aux pays en développement dépassant ce taux, ils pourraient bénéficier d’une période de transition.
M. Wills a par ailleurs expliqué aux journalistes avoir inclus dans le projet de texte révisé la proposition américaine sur le travail forcé.
Fin mai, les États-Unis ont en effet mis sur la table une proposition visant à diminuer le recours au travail forcé sur les navires de pêche, estimant que celui-ci « exacerbe la surpêche et l’épuisement des océans ».
« La prévalence du travail forcé dans l’industrie de la pêche (…) fonctionne comme une subvention, comme une incitation à la surpêche, et donc, de notre point de vue, tout accord significatif sur les subventions à la pêche doit prendre en compte la composante humaine de cette industrie », avait déclaré à des journalistes la représentante américaine au Commerce Katherine Tai lors de son passage à la mi-octobre à Genève.
Mais cette proposition est loin de réjouir certains pays en développement qui estiment que la question du travail forcé doit rester du domaine de l’Organisation internationale du travail (OIT), dont la Convention sur le travail dans la pêche entrée en vigueur fin 2017 permet d’immobiliser des navires.