« Nous sommes vraiment entrés dans la phase de marchandage », a déclaré un représentant.
« Cela va durer toute la nuit, les gens ont l’air fatigué », a-t-il dit à l’AFP. « Espérons que des accords seront conclus ».
Rien n’est en effet garanti car les décisions sont prises par consensus et un seul peut faire capoter un accord.
Les ministres, dont la représentante américaine au Commerce Katherine Tai, vont et viennent par petits groupes dans les différentes salles qui leur sont réservées au siège de l’organisation, située le long du lac Léman.
La 12e conférence ministérielle de l’OMC – l’organe de décision suprême de l’organisation – a démarré dimanche mais les ministres ont jusqu’à présent échoué à trouver des accords, en raison notamment de l’intransigeance indienne sur plusieurs sujets, selon des sources proches des négociations.
A la demande de certaines délégations, la directrice générale de l’OMC, Ngozi Okonjo-Iweala, a accordé aux négociateurs, une journée de plus: jusqu’à jeudi 15H00 (13H00 GMT), dans l’espoir que ces heures supplémentaires de négociation leur permettent d’aboutir.
Mais les tractations piétinent depuis des années, et Mme Ngozi a prévenu d’emblée à l’ouverture de la réunion ministérielle que le chemin serait « chaotique ».
« Et il y aura peut-être quelques mines le long de la route », a-t-elle mis en garde.
La pression pour aboutir est forte d’autant que la précédente ministérielle fin 2017 à Buenos Aires est considérée par de nombreux observateurs comme un échec, faute d’accord majeur conclu.
L’OMC a par ailleurs perdu un peu plus de son éclat depuis que la cour d’appel de son organe de règlement des différends commerciaux a été bloquée fin 2019 par l’administration de Donald Trump, qui était ouvertement hostile à l’organisation.
Mme Okonjo-Iweala, première femme et première Africaine à diriger l’OMC, a promis de donner un véritable coup de fouet à l’organisation pour lui rendre son rôle sur la scène internationale, en particulier face à la pandémie de Covid-19.
– « Dans le bon sens » –
Cette question est d’ailleurs l’un des principaux sujets sur la table des négociations.
Deux textes sont discutés, l’un sur la levée temporaire des brevets sur les vaccins anti-Covid et l’autre sur la facilitation du commerce des biens médicaux nécessaires à la lutte contre les pandémies.
Plus tôt dans la journée, le ministre français du Commerce extérieur Franck Riester, avait indiqué que ces questions de santé et commerce évoluaient « dans le bon sens ».
L’OMC est sous pression de pays en voie de développement et d’ONG depuis octobre 2020 pour accepter une levée des droits de propriété intellectuelle sur les moyens médicaux de lutte contre le Covid.
Face à l’opposition de certains pays riches, où le secteur pharmaceutique pèse lourd dans l’économie, le texte sur la table ne prévoit plus qu’une levée temporaire des brevets sur les vaccins pour les pays en développement.
La Chine – considérée comme un pays en développement à l’OMC – a indiqué qu’elle n’entend pas bénéficier de ce traitement spécial et différencié, mais les Etats-Unis souhaitent que cette promesse soit écrite.
Le projet de texte envisage par ailleurs la possibilité d’étendre l’accord aux tests et aux traitements six mois après son adoption, mais la Suisse et le Royaume-Uni ont émis d’importantes réserves à ce sujet.
L’OMC est également très attendue sur l’interdiction des subventions qui menacent la durabilité de la pêche, des négociations en cours depuis 2001.
Des progrès ont été faits ces derniers mois mais l’Inde s’oppose à toute interdiction de ces subventions contribuant à la surpêche et à la surcapacité avant 25 ans. Le projet d’accord vise lui 2030.
Le pays a aussi des réticences sur le projet de texte visant à interdire les restrictions à l’exportation concernant les achats du Programme alimentaire mondial.
L’Inde, mais également l’Afrique du Sud, le Pakistan, l’Indonésie et le Sri Lanka, ont également fait part de leurs réticences à prolonger le moratoire sur les droits de douane pour les transmissions électroniques, sur laquelle les ministres doivent se prononcer, selon une source proche des discussions.