Fines de claire et gambas, cocktail gagnant en Charente-Maritime à l’approche des fêtes

A l’instar de la Charente-Maritime, David Hervé, 47 ans, a d’abord été reconnu pour ses huîtres de haute qualité.

L’ostréiculteur, qui a repris voilà 28 ans le Cabanon de l’huître de son grand-père et de son père, à Saint-Just-Luzac dans le bassin de Marennes-Oléron, a fait de son nom une marque médaillée d’Or au concours général agricole en 1999, 2000, 2002, 2004 et 2005 pour ses « pousses en claire ». Des coquillages recherchés par les plus grands restaurants, qui se vendent dans le monde entier, de la Suède à la Chine en passant par la Russie.

Désormais, David Hervé s’est aussi fait un nom pour ses gambas, qu’on retrouve par exemple sur les tables des chefs étoilés Pierre Gagnaire et Guy Savoy.

Début mai, l’ostréiculteur a réceptionné les derniers « bébés » crevettes arrivés d’une écloserie de l’Hérault. Ils ont été introduits directement dans les claires à ciel ouvert, d’anciens marais salants reliés à la mer par un dédale de canaux. La température de l’eau, au-dessus de 15°C, est désormais suffisante pour leur croissance. Mais ces nouveaux venus ont été précédés par un premier arrivage, un mois plus tôt, qui a d’abord séjourné dans une claire transformée en « serre » au moyen d’une bâche translucide.

« Celles-ci ont été commercialisées dès le mois de juillet. Pour les autres, elles ont été à maturité fin août », explique le producteur.

Des gambas en France, cela peut surprendre. La Charente-Maritime en a pourtant fait une spécialité depuis vingt ans.

« Nous rassemblons toutes les conditions », remarque David Hervé. « Il ne peut pas y en avoir en Normandie ou en Bretagne car il n’y a pas de marais salants. Cette production est également impossible en Méditerranée car l’eau est trop salée et il n’y a pas de marée suffisante pour renouveler l’eau ».

« Il s’en fait un peu en Vendée et dans le Médoc, mais les performances y sont moindres. Ici, nous avons les conditions climatiques idéales: ensoleillement, pluviométrie pour l’apport en eau douce et les bonnes températures », détaille-t-il.

– Quasiment bio –

Fort de ces avantages, David Hervé mise sur la qualité plus que la quantité. « J’ai produit jusqu’à cinq tonnes de crevettes par an avant de redescendre à trois tonnes (seulement 2,4 tonnnes en 2015) car désormais, je ne compte en moyenne qu’une seule crevette par mètre carré, pas plus, pour qu’elle ait la nourriture suffisante naturellement », explique le producteur, qui emploie 18 personnes.

Pas de soja, de blé ou de farine de poissons donc. Les crustacés ne mangent que des petits vers appelés néréides ou gravettes, naturellement présents dans les claires. Et ils cohabitent avec les huîtres pour le bien de tous, y compris du marais lui-même.

En grattant la vase pour débusquer les vers, les crevettes troublent l’eau, ce qui dynamise la photosynthèse tout en la limitant aux seuls phytoplanctons dont se nourrissent les huîtres et les crevettes. Car avec la turbidité ainsi créée, les gambas empêchent aussi le développement de grandes algues, des macrophytes, qui bloqueraient la lumière et déséquilibreraient cet écosystème fragile.

David Hervé n’est pas le seul producteur de crevettes impériales du département mais il compte parmi les pionniers à s’être lancé dans l’aventure. On en recense 24 aujourd’hui, regroupés au sein de l’Association crevette impériale des marais charentais (ACRIMA) et répartis sur les îles d’Oléron, Ré et Madame, et le long de la Seudre.

A eux tous, ils en commercialisent 40 tonnes par an. Une goutte d’eau par rapport au volume de gambas importées, mais les crevettes françaises sont quasiment « bio ».

« Seule la qualité de l’eau de mer, que nous ne maîtrisons pas, empêche de revendiquer ce label », souligne David Hervé.

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