A bord du Gwenvidick, la pêche à la « demoiselle » vire à la chasse aux rejets

La langoustine, c’est l’emblème des ports bigoudins. Et d’avril à juillet, la campagne bat son plein. Mais ce secteur est devenu moins rentable, victime des prix du carburant et des normes européennes sur les rejets.

« Elle représente 80% de notre chiffre d’affaires, explique Dominique Faou, artisan-pêcheur, le reste c’est pour le merlu, la sole, la baudroie, le tacaud ou le congre ».

Sur le bateau ce matin-là, deux hommes manoeuvrent pour mettre à l’eau les 12 mètres de filets, pour trois heures de drague avant leur relève. Et l’opération est répétée 3 à 5 fois par jour, toujours suivie de près par une myriade de goélands criailleurs attirés par l’odeur du poisson.

« La pêche est correcte sans plus », prévient le capitaine, tandis que le contenu du « cul du chalut » est déversé sur le pont envahi par des paquets d’eau, dans le bruit fracassant de treuils et de chaînes.

Rapidement les langoustines sont triées par taille, plongées dans des bacs d’eau de mer pour les garder vivantes.

Le Gwenvidick est ainsi en mer entre 180 et 200 jours par an pour une recette journalière variable: les bons jours 4.000 euros ou plus, les mauvais 300, « même pas de quoi payer le plein de gasoil, alors que le prix du poisson acheté au bateau ne cesse de dégringoler », s’inquiète M. Faou.

Sans compter les directives de Bruxelles que Patrice Donnart, président de Pêcheurs de Bretagne, compare à « un rouleau compresseur ». « A peine le temps de se mettre en conformité avec une norme, qu’une nouvelle encore plus tracassière vient réglementer notre activité ».

En ligne de mire : celle sur les rejets, ces poissons remontés dans les filets mais remis à l’eau, parfois morts, car trop petits, hors quotas, ou pas intéressants.

Mieux vaut trier sur le fond que sur le pont

Bruxelles veut limiter ces rejets à 5% des volumes pêchés à partir de 2014 contre 26% actuellement en France, selon l’Ifremer.

Et l’étude Obsmer, menée par cet institut de recherche sur la mer, montre que les chalutiers rejettent plus que les palangriers ou fileyeurs.

Et que les flottilles côtières, loin devant les flottilles hauturières, sont les mauvaises élèves des rejets. Pour certaines pêches, cela peut représenter jusqu’à la moitié des captures.

Il est ainsi reproché aux professionnels de la langoustine de remonter de trop petits merlus avec les langoustines.

« Les pêcheurs ont déjà fait énormément de concessions pour une pêche durable et responsable », assure M. Donnart, notamment « pour améliorer la sélectivité des engins de pêche ».

Aujourd’hui, les chalutiers travaillent avec un maillage de filet de 80 millimètres pour éviter de remonter les espèces juvéniles. La réglementation française a par ailleurs fixé à 9 centimètres la taille minimum pour la capture de la langoustine, soit 2 cm de plus que celle imposée par les textes communautaires.

« Mieux vaut trier sur le fond que sur le pont », reconnaît le patron du Gwenvidick. Mais, pour les professionnels, la prochaine réglementation à 5% des volumes pêchés apparaît souvent « déconnectée de la réalité ».

Selon le ministre de la Mer et de la Pêche, Frédéric Cuvillier, elle ne pourra être mise en place sans tenir compte des spécificités des pêches, des flottilles et de leur ancienneté.

Aider les pêcheurs à préserver la ressource suppose notamment une meilleure sélectivité de leurs engins de pêche.

A ce titre, le ministre a réitéré son souhait d’une adoption la plus rapide possible du Fonds européen des affaires maritimes et de la pêche (FEAMP), l’instrument financier de la Politique commune de la pêche.

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