La ligne entre Dunkerque et Rosslare, à la pointe sud-est de l’Irlande, a été ouverte par la société danoise DFDS le 2 janvier. Elle permet aux transporteurs de relier la République d’Irlande au reste de l’Union européenne sans passer par le Royaume-Uni, évitant les nouvelles barrières douanières en place.
Depuis, le port a enregistré une hausse de 476% du trafic de fret vers l’Europe continentale, par rapport à l’année dernière, indique son directeur, Glenn Carr, à l’AFP. « Nous sommes passés de trois services directs par semaine vers l’Europe continentale à 15 aujourd’hui », ajoute-il, sidéré.
Ici, des chauffeurs criant en français s’affairent autour d’un chargement de machines agricoles. Là, des transporteurs espagnols attendent dans leurs véhicules d’embarquer pour Bilbao.
Sur le chemin menant aux docks, un panneau salue le flux constant de nouveaux arrivants d’un « Europort de Rosslare: la porte vers l’Europe ».
– Exit le « pont terrestre » –
Le Royaume-Uni a officiellement quitté l’Union européenne fin janvier 2020, plus de quatre ans après le référendum de 2016 qui avait vu le pays voter à 52% pour le Brexit. Mais les effets concrets de cette décision ne se font sentir que depuis le début de cette année, après une période de transition.
Face aux contraintes et retards provoqués par les nouvelles formalités, les transporteurs irlandais sont de plus en plus réticents à emprunter le « pont terrestre » que constituait jusqu’ici le Royaume-Uni pour relier l’Irlande au reste de l’Union européenne.
Avant Brexit, plus de 150.000 camions transportaient chaque année quelque 3 millions de tonnes de fret depuis et vers l’UE par cette voie, traversant rapidement la mer d’Irlande pour accoster au Pays de Galles, puis repartir en ferry du sud de l’Angleterre pour traverser la Manche.
Début janvier, le port de Dublin – maillon essentiel de ce « pont terrestre » – a connu une brusque accalmie dans ses flux, et certaines traversées ont été annulées.
Depuis, des signes montrent que le port de Rosslare, beaucoup plus petit que celui de Dublin mais deuxième principale plaque tournante d’Irlande en matière de transport de marchandises, pourrait devenir la nouvelle voie privilégiée vers l’Europe. C’est celle qui promet le moins de complications, malgré un temps de traversée plus long.
« Lorsque vous prenez le transport d’une marchandise d’un bout à l’autre, ce qu’on nous dit et ce qu’on constate c’est qu’il n’y pas grande différence entre (la route empruntée) maintenant et le pont terrestre », rapporte M. Carr. « Par contre, vous n’avez pas de paperasse à remplir, vous économisez du carburant et vos chauffeurs sont plus reposés ».
– Nouveaux frais –
Parmi l’immense forêt de camions garés dans les docks de Rosslare, une couleur se détache: le bleu particulier des remorques Amazon Prime. Des dizaines sont éparpillées à travers le port, que des remorqueurs chargent et déchargent à un rythme soutenu.
Jusqu’ici, les cinq millions d’Irlandais comptaient souvent sur des sites britanniques, plus largement fournis, pour faire leurs achats en ligne.
Mais le site britannique du géant de la vente en ligne, amazon.co.uk, impose depuis le 1er janvier des « frais d’import » sur certains articles, pour couvrir les « taxes à la frontière, les droits de douane et les frais prélevés dans le pays d’importation ». Mais les clients irlandais peuvent éviter les frais et perturbations en utilisant les sites européens d’Amazon (amazon.fr, amazon.es, amazon.de).
Selon Glenn Carr, certains signes montrent que les habitudes des distributeurs et des acheteurs ont déjà changé depuis la fin de la période de transition.
« Beaucoup de grandes enseignes irlandaises font désormais venir directement d’Europe continentale leurs produits », explique-t-il. « Nous voyons de gros clients comme Amazon apporter quotidiennement de nombreuses cargaisons ».
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