« Les recherches ont repris tôt ce matin, nous espérons en terminer aujourd’hui, d’autant plus que les conditions météo sont bonnes », a expliqué lundi à l’AFP le commandant Filippo Marini, responsable des garde-côtes.
En milieu de journée, dix-sept nouveaux corps, dont ceux de quatre femmes, avaient été récupérés par les plongeurs.
Ces derniers devaient se concentrer sur l’arrière de l’embarcation avant de pénétrer dans la cale, où devraient se trouver les migrants ayant payé les billets les moins chers pour passer en Europe.
Les autorités qui ont récupéré 211 corps redoutent que le naufrage de jeudi à l’aube ait en réalité fait entre 300 et 360 morts.
A la demande de l’Italie, qui fait face à un afflux exceptionnel de migrants (30.000 depuis le début de l’année, quatre fois plus qu’en 2012), l’immigration figurera mardi à l’ordre du jour d’une réunion ministérielle européenne à Luxembourg.
Et mercredi, le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, se rendra sur l’île afin de « rendre hommage aux victimes et exprimer solidarité et gratitude aux habitants de Lampedusa ».
Dans un communiqué, M. Barroso a affirmé que la Commission, « dans la mesure de ses compétences, (continuait) à travailler sur des mesures et des actions concrètes », sans préciser lesquelles.
La frilosité de l’Union européenne pour modifier sa politique migratoire est liée à la complexité d’un dossier politiquement explosif, notamment à l’approche du scrutin européen du printemps 2014.
L’Europe du sud (Grèce, Italie, Espagne) réclame un mécanisme de répartition européen pour la gestion des demandes d’asile alors que, selon le principe dit de Dublin II, datant de 2003, les candidats doivent déposer leur demande dans le premier pays dans lequel ils entrent.
Autre exigence: un contrôle accru des côtes européennes qui est du ressort de l’agence Frontex, créée en 2004 mais dont le budget annuel ne dépasse par 60 millions d’euros, une « honte » selon le chef de la diplomatie française Laurent Fabius.
En Italie, le gouvernement de coalition gauche-droite, par la voix de sa ministre de l’Intégration Cécile Kyenge, a aussi annoncé une réunion cette semaine pour modifier la loi Bossi-Fini qui considère comme « suspects » tous les immigrants clandestins.
C’est le cas des 154 rescapés du naufrage de Lampedusa traités par la législation comme des délinquants au même titre que le passeur tunisien de 35 ans qui pilotait leur bateau clandestin, parti de Misrata en Libye.
Rencontré dans le centre d’accueil de Lampedusa, l’un d’eux, Ali, a raconté à l’AFP comment il avait « nagé pendant cinq heures avant que les secours arrivent ». « Ma famille et beaucoup d’amis étaient sur ce bateau. Je ne peux pas en parler, c’est trop douloureux », a confié Ali, parti d’Erythrée dont il fuyait le régime dictatorial.
Les autorités de la petite île sicilienne qui vit normalement de la pêche et du tourisme sont débordées par la forte reprise ces dernières semaines des débarquements de migrants et réfugiés.
« Franchement nous n’en pouvons plus, avec tous ces gens qui arrivent sur cette île qui devrait être une magnifique destination touristique avec les plages les plus belles du monde devenue un grand cimetière. L’Europe doit agir avant que cela ne recommence », confie à l’AFP Filippo Bruno, un pêcheur de 57 ans.
Le centre d’accueil est actuellement submergé avec 1.000 occupants (pour officiellement 250 lits) dont certains sont contraints de dormir à l’extérieur sous des abris de fortune.
La Sicile est particulièrement sollicitée avec l’arrivée de 363 migrants syriens et égyptiens dont 200 — sauvés par le navire océanographique français Suroit et un navire marchand hollandais — transférés lundi à Pozzallo et les autres à Syracuse.