Depuis janvier, le phénomène climatique El Niño, en réchauffant la température de la mer, qui s’évapore et donne lieu à de fortes pluies dans les Andes, provoquant inondations, avalanches et coulées de boue, a causé la mort d’au moins 79 personnes au Pérou, dont une trentaine cette dernière semaine, selon le dernier bilan des autorités.
Plus de 100.000 habitants ont tout perdu et quelque 620.000 autres ont subi des pertes matérielles.
Le pays avait déjà connu des épisodes similaires en 1925, 1983 et 1997, se souvient l’ex-ministre de l’Industrie et de l’Economie, Guido Pennano.
Au début des années 1980, les inondations et les épidémies qui s’en étaient suivies avaient fait 9.000 morts au Pérou, où le produit intérieur brut (PIB) avait alors chuté de 11,6%. Celles de 1997-1998 avaient tué 500 personnes et contracté le PIB de 6,2%.
« L’impact de ce phénomène (en cours) sur la production est très proche de celui de 1983 (…) l’agriculture du nord et ses exportations sont touchées, le secteur minier et la pêche vont souffrir. Ce sont les trois secteurs qui animent l’activité productive du pays », explique l’ancien ministre à l’AFP.
L’activité économique du Pérou, l’une des plus solides d’Amérique latine, a connu une croissance de 3,9% en 2016, profitant d’une production record dans le secteur minier (cuivre, argent et fer), l’un de ses principaux moteurs.
Pour 2017, le gouvernement a dû revoir à la baisse ses prévisions officielles de croissance, à 3,8%, à cause du scandale de corruption Odebrecht, le géant brésilien du BTP qui a soudoyé hommes politiques et fonctionnaires dans plusieurs pays d’Amérique latine. A la clé, un impact négatif sur l’économie du Pérou: plusieurs projets attribués au groupe doivent en effet être vendus ou soumis à nouveau à appel d’offres.
– ‘Affecter les exportations’ –
Le pays andin est le deuxième producteur d’argent, le troisième de cuivre et le cinquième d’or. En 2016, l’ensemble de ses exportations a cru de 7,6%, avec 1,7 milliard de dollars d’excédent commercial à la clé. Mais à l’heure actuelle, plusieurs routes et ponts sont coupés, ainsi que la principale voie de chemin de fer, par où transite la production minière vers les ports afin d’être exportée.
« L’infrastructure du chemin de fer central a subi d’importants dommages et nous allons avoir besoin de temps pour réparer (les voies) », a reconnu le ministre de l’Energie Gonzalo Tamayo.
Des interruptions des voies de communication qui pourraient « affecter les exportations », juge l’économiste Gonzalez Izquierdo.
A cause des problèmes d’approvisionnement, des rayons vides étaient visibles dans les supermarchés de certaines villes, comme à Trujillo, à 570 kilomètres au nord de Lima.
Par ailleurs, le Pérou, plus grand producteur mondial de farine de poisson, pourrait également être affecté par le réchauffement de l’océan le long de ses côtes, faisant fuir certaines espèces. Sans oublier que ses principales zones de pêche destinée à l’exportation se trouvent dans le nord, la région la plus touchée par les intempéries.
Certains spécialistes relativisent, en soulignant qu’après une catastrophe naturelle, on assiste à un effet rebond, grâce à la reconstruction des infrastructures.
Mais cela « ne fait que réparer les dommages (…) Une route dévastée est reconstruite. Mais vous n’avez pas deux routes, c’est toujours la même route », explique M. Izquierdo, qui conteste cette théorie.
Selon lui, si les pluies se calment et ne se poursuivent pas en avril, l’impact pourrait se limiter à 0,3 point de pourcentage du PIB. Mais si les intempéries continuaient, se pourrait être bien pire.