Dans sa déclaration de politique générale mi-janvier, François Bayrou avait annoncé son intention d’inviter « les forces politiques » de Nouvelle-Calédonie, disant souhaiter la reprise du « processus politique avec des négociations qui devront aboutir à la fin de ce trimestre ».
La tâche a été confiée au ministre des Outre-mer Manuel Valls, qui avait déjà la charge du dossier calédonien lors de son passage à Matignon (2014-2016). L’ancien Premier ministre débute mardi ces « bilatérales » avec six délégations calédoniennes, représentant les forces politiques constituées en groupe au congrès de Nouvelle-Calédonie.
Peu de détails ont filtré sur le contenu et l’agenda des discussions.
« Cette nouvelle séquence a pour objectif de rétablir un dialogue sincère et apaisé entre les parties prenantes dans le cadre de la sortie de l’accord de Nouméa », a seulement indiqué le ministère des Outre-mer, qui plaide la « discrétion » pour favoriser « l’esprit de responsabilité et d’écoute ».
« Ces échanges viseront à clarifier les positions de chacun, à lever les malentendus et à approfondir la compréhension des projets d’avenir portés par chaque groupe », a ajouté le ministère, disant espérer, « si les conditions politiques sont réunies, ouvrir la voie à des négociations plus formelles ».
Mais le chantier est ardu tant le fossé s’est creusé entre non-indépendantistes et indépendantistes, qui arrivent eux-mêmes divisés.
Principale alliance indépendantiste, le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) est affaibli par le retrait de ses deux composantes les plus modérées (le Palika et l’UPM) mais entend poser à Paris ses conditions à la reprise du dialogue, exigeant « un accord conduisant à l’indépendance » conclu au plus tard en septembre 2025.
Le FLNKS a en outre élu à sa tête Christian Tein, en détention provisoire pour son rôle dans les émeutes de 2024, une provocation aux yeux des loyalistes. « On a face à nous des gens qui ne veulent pas d’accord », ont martelé la semaine dernière Sonia Backès et Nicolas Metzdorf, les deux chefs de file loyalistes, lors d’une réunion à Paris.
« On va à la table des négociations avec deux objectifs: faire respecter les résultats des trois référendums (de 2018, 2020 et 2021 qui se sont soldés par une victoire du « non », ndlr) et pouvoir vivre en sécurité », selon le député Nicolas Metzdorf.
Reste que le FLNKS, mené par l’autre député calédonien Emmanuel Tjibaou, a accepté de se déplacer, une première depuis les émeutes de mai 2024. « Je prends comme un signe positif que toutes les formations politiques soient venues », a confié à l’AFP la présidente du Congrès calédonien, Veylma Falaeo, du parti Eveil océanien (EO).
« Posons sur la table les visions de chacun. Faisons simplement la liste des points sur lesquels nous sommes d’accord et ceux sur lesquels nous ne sommes pas d’accord », a ajouté la responsable de ce parti prônant une « troisième voie », qui espère que les bilatérales « vont permettre à l’Etat d’effectuer ce travail ».
Les discussions aborderont aussi à partir de samedi les questions économiques alors que l’archipel a été ravagé par les émeutes qui ont éclaté en mai 2024, faisant 14 morts et plus de 2,2 milliards d’euros de dégâts.