Biodiversité: l’Assemblée rejette l’interdiction du chalutage en eau profonde

Dénonçant “une pratique de pêche qui représente un massacre pour la biodiversité, pour un gain économique très faible”, la chef de file des députés écologistes sur le projet de loi pour la biodiversité, Laurence Abeille, a souligné combien son groupe mais aussi les associations environnementales étaient mobilisés.

L’amendement proposé ne fixait aucune date d’application, la renvoyant à un décret du gouvernement.

Selon ses détracteurs, la pêche en grande profondeur ne concerne qu’une douzaine de navires français mais elle abîme les sols marins et fragilise des espèces menacées, comme les requins d’eaux profondes.

La maintenir est “une aberration”, “ne correspond pas à la loi sur la transition écologique et représente un très mauvais signe à la veille de la Cop21”, organisée à Paris en décembre, s’est exclamé Noël Mamère.

Après avoir rappelé sa “mobilisation” contre cette pratique de pêche qui fait “beaucoup de dégâts”, et insisté sur sa “pression très forte sur les instances européennes”, la ministre de l’Ecologie s’est opposée à l’interdiction.

“S’il y a une interdiction unilatérale, cela ne s’appliquera qu’aux bateaux français -ce qui n’est pas acceptable pour la survie de la filière pêche-, et cela pourrait freiner toutes les démarches au niveau européen pour réglementer la protection des écosystèmes marins pour toutes les filières de pêche”, a notamment argumenté Ségolène Royal.

Sur ce “sujet important qui concerne beaucoup d’élus du groupe” socialiste, le chef de file des députés PS Bruno Le Roux a jugé “pas possible de prendre au détour d’un amendement une position contraire à celle du gouvernement depuis 2010” en faveur du concept de pêche durable, et défendu “un encadrement strict” plutôt qu’une interdiction.

Favorable à titre personnel à l’interdiction d’une pratique de pêche qui “n’a jamais été durable”, la rapporteure Geneviève Gaillard (PS) a expliqué que la commission du Développement durable de l’Assemblée avait à l’inverse rejeté une “interdiction brute de décoffrage” au profit notamment de solutions alternatives et d’un plan pour les pêcheurs employés par les sociétés faisant du chalutage en eau profonde.

S’il a reconnu que “le chalutage en eau profonde pose problème”, le député UMP du Morbihan Philippe Le Ray a affirmé que “la France ne couvre que 20% de ses besoins en poissons”, que “les professionnels ne pêchent pas n’importe quoi” et qu’une interdiction “unilatérale mettrait gravement en difficulté le port de Lorient”.

Considérant que le blocage est “uniquement un problème français autour de l’entreprise ScaPêche, flotte d’Intermarché”, l’UDI Bertrand Pancher a suggéré de “faire confiance dans un premier temps aux acteurs”, vu “l’engagement de cette société de pêcher nettement moins en eau profonde”.

Le Premier ministre Manuel Valls a écarté début décembre à Nantes une interdiction de la pêche en eaux profondes, même s’il a souhaité “trouver un chemin avec l’appui des scientifiques” contre “le laisser-faire”.

La Commission européenne avait proposé en 2013 l’interdiction du chalutage profond, mais celle-ci a été finalement repoussée en décembre par les eurodéputés, qui se sont contentés d’encadrer ce type de pêche.

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