Au retour de la marée, dans le petit village ostréicole des Boucholeurs, en face de l’île d’Aix, Fanny Marié ne cache pas son désarroi et reconnaît que « la profession a pris un coup au moral avec le confinement ».
« Les ostréiculteurs ne baissent jamais les bras mais là, on a besoin d’être épaulés », lance-t-elle, les bottes encore aux pieds.
A 47 ans, elle a pourtant régulièrement adapté son activité pour répondre aux nouveaux modes de consommation. « En plus des marchés traditionnels, de la grande distribution et des restaurants, avec mon mari on participe aux marchés de producteurs, on a une cabane de dégustation face à la mer et on tient un bar à huîtres pour les festivités ou les concerts. Mais avec le confinement, toute la vente de détail s’est arrêtée », résume-t-elle.
« Et il n’est pas question de se mettre en chômage quand on travaille le vivant. On est à – 80% de notre chiffre d’affaires habituel. Si on avait fait de la vente en gros, on serait déjà mort », dit-elle, alors que depuis le confinement, il n’est plus rare de voir dans le Sud-Ouest des ostréiculteurs tenter d’écouler leur production aux carrefours routiers ou sur des parkings.
Comme Fanny Marié, « l’ensemble de la profession a vu son chiffre d’affaires baisser des trois quarts », abonde Daniel Coirier, président du Comité régional de la conchyliculture de Poitou-Charentes.
« On a besoin de soutien comme les autres secteurs », insiste-t-il, rappelant qu’avant le confinement décrété le 12 mars, les ostréiculteurs ont déjà été malmenés.
« En janvier dernier, l’épidémie de gastro-entérite nous a fait mal, et depuis trois ans, les tempêtes sont plus dures et cassent beaucoup de matériel en mer », rappelle Fanny Marié.
– Inquiétudes pour Noël –
Pour leur venir en aide, la députée girondine LREM Sophie Panonacle a mobilisé 28 de ses collègues pour adresser le 25 mai un courrier au gouvernement. Les élus demandent « le même traitement pour la filière ostréicole que pour les entreprises du secteur touristique, à savoir l’exonération des cotisations sociales pour une période de 6 mois à compter de mars 2020 ainsi que l’annulation des loyers et des redevances d’occupation du domaine public ».
Car les ostréiculteurs payent pour occuper les bords de l’océan avec leurs parcs à huitres.
Le député LR de Charente-Maritime Didier Quentin a lui réécrit au ministre de l’agriculture pour rappeler les difficultés des « paysans de la mer ».
Car les difficultés de l’ostréiculture de Charente-Maritime, dont la production annuelle de quelque 40.000 tonnes fait vivre un petit millier d’exploitants, pourraient encore empirer à l’automne.
« Espérons que l’été sera bon en termes de ventes sinon on va avoir des surstocks, ce qui fera chuter le cours de l’huître », prévient Laurent Chiron, président du groupement de qualité Marennes-Oléron.
Or c’est à l’automne que les ostréiculteurs négocient le prix des huîtres pour les fêtes de fin d’année, un moment crucial pour le département qui reste le premier producteur d’huîtres français et pèse un tiers des expéditions internationales.
« Le seul mois de décembre représente environ 50% du chiffre d’affaires annuel d’une entreprise », souligne Laurent Chiron. Et si une deuxième vague pandémique frappe l’Hexagone à cette période, « c’est la fin. Je ne sais pas comment on fera ».