C’était il y a quelques jours quand, face au marasme du secteur de la croisière, les balades en petits bateaux s’en sortaient plutôt bien et profitaient même de la crise sanitaire.
Aujourd’hui, malgré le coup d’arrêt de la fermeture pour un mois, ces petites compagnies fluviales gardent le moral, sans trop craindre ces nouvelles contraintes. A condition qu’elles puissent rouvrir aux beaux jours.
« On ne va pas pouvoir naviguer pendant un mois », soupire le gérant de la compagnie Bordeaux sur l’eau, au lendemain de l’annonce des nouvelles mesures contre le Covid-19.
« On était les derniers à pouvoir encore un peu travailler. On n’est pas désespérés mais il ne va pas falloir que ça dure encore trop longtemps », dit M. Lescurat qui vient de « plutôt reporter qu’annuler » une quinzaine de réservations pour avril.
Car la saison des balades fluviales venait à peine de redémarrer. Vanessa Dos Santos, organisatrice d’un enterrement de vie de jeune fille, avait abandonné l’idée d’aller à Lyon car « c’était compliqué avec le Covid. Donc, j’ai essayé de trouver des activités autour de Bordeaux ».
Une balade en plein air entre copines sur un petit bateau, le week-end dernier, c’est « plus sûr qu’avec des gens qu’on ne connaît pas », selon la future mariée.
C’est grâce à cette particularité que les compagnies avec des petites unités d’une dizaine de passagers, comptent toujours tirer leur épingle du jeu face aux croisières maritimes et fluviales avec restauration ou hébergement à bord, clouées au ponton à cause de l’épidémie.
Le « Covid est arrivé et sans dire qu’il nous a bien aidés, ça nous a fait connaître », reconnaît Pierre-André Lescurat, à la barre de son chaland ostréicole aux « 12 passagers maximum ».
L’embarcation à fond plat de 50 m2, typique du bassin d’Arcachon et de ses ostréiculteurs, accueille depuis 2018 une clientèle essentiellement locale pour des balades à ciel ouvert en amont de Bordeaux.
Le long de la Garonne sauvage et de ses carrelets, cabanes de pêcheurs sur pilotis emblématiques de la région, ces balades privatisées à la carte s’adressent uniquement aux petits groupes, pour 180 euros de l’heure.
– Une bonne année –
Malgré l’épidémie, son chiffre d’affaires a bondi de 20% en 2020, « une bonne année », confirme avec ironie le gérant, le « Covid accentue un peu plus la demande ».
Son concurrent de la compagnie Bordeaux Be Boat est du même avis. « Nous avons fait une meilleure saison que 2019 pour les mois de juillet et août 2020. Les bateaux sont ouverts, c’est +Covid safe+ », précise Adrien Creuzé, à la tête de la société.
Les clients viennent pour « se vider la tête sans être entourés par la foule » et « sans se soucier des voisins qui peuvent être anxiogènes », poursuit-il.
Lui non plus ne s’inquiète pas trop pour l’instant des quatre semaines de fermeture, d’autant qu’il n’ouvrait que dans une semaine : la « fermeture en avril, c’est embêtant mais ce n’est pas la fin du monde. Mais s’ils nous font ça en juin, juillet ou août… ».
La situation contraste avec celle des gros paquebots des croisières maritimes et fluviales historiques de l’estuaire, dépendantes du tourisme international, quasiment à l’arrêt depuis plusieurs mois.
L’année dernière, la compagnie maritime du Ponant n’a effectué qu’une dizaine d’escales à Bordeaux pour un total de 790 passagers, contre 42.000 en 2019, selon les chiffres du bilan 2020 de l’Office de tourisme de Bordeaux métropole.
Et pour 2021, « une vingtaine d’escales ont déjà été annulées », confirme Laurence Bouchardie, en charge des croisières au Grand Port Maritime de Bordeaux.
Quant aux grands opérateurs de croisières à la journée ou à la demi-journée, ils ont vu leur fréquentation baisser de 80% en 2020, selon les calculs du syndicat d’initiative.
« Cette baisse est liée à l’annulation de nombreux événements professionnels », regrette Laura Marchoux de la compagnie Bordeaux River Cruise, spécialiste des croisières avec repas ou promenades à la demi-journée, obligée de miser, elle aussi, sur les « balades courtes sur la Garonne » pour relancer l’activité.