En Guadeloupe, des solutions fondées sur la nature pour réduire l’érosion des côtes

Pointe-à-Pitre, 16 nov 2023 (AFP) – Végétaliser le sable en bord de mer, restaurer les mangroves et réimplanter des coraux, en Guadeloupe, face aux risques d’érosion et de submersion marine: des solutions « fondées sur la nature sont expérimentées » pour éviter de recourir aux méthodes artificielles comme l’enrochement.

« L’idée, c’est vraiment d’apprendre des projets expérimentaux menés aux Antilles, et plus largement en Outre-mer, jusqu’à présent pour mettre en place des solutions fondées sur la nature », a expliqué à l’AFP Virginie Duvat, chargée du projet de recherche AdaptOM qui tente d’établir les limites et l’efficacité de ses solutions.

La géographe, co-autrice du 6e rapport du Giec, présente en Guadeloupe pour la restitution du projet sur son volet Antilles, rappelle la vulnérabilité des petites îles, notamment tropicales, aux effets du dérèglement climatique. Ainsi en Guadeloupe, selon l’observatoire régional de l’énergie et du climat, le recul du trait de côte est inéluctable d’ici 50 ans, tout comme le risque de submersion marine, estimé pour certaines zones jusqu’à 180 jours par an d’ici à 2050.

Alors dans l’archipel, plusieurs méthodes sont en test, résultant d’appels à projets ou d’une prise de conscience par les gestionnaires d’un site littoral de son déclin.

A Saint-François, sur la côte est de la Grande-Terre, « l’étude de la végétation du bord de mer a mis en évidence son rôle dans le maintien du cordon sableux », indique Jérémie Delolme, pilote du projet Plant’Aktyon qui tente de restaurer la végétation littorale endémique, minée notamment par le piétinement des usagers de la plage. « On replante avec le concours d’écoliers des plantes rampantes, buissonnantes et arborées, pour favoriser le maintien du sable sur nos plages en fort recul ».

Ailleurs, dans l’archipel, on essaie aussi de replanter les littoraux, comme à Port Louis, au nord de la Grande-Terre, où les mangroves, forêts poussant dans la vase des littoraux tropicaux, se retrouvent en plein coeur de la plus grosse zone économique de l’archipel.

– Replantation de coraux –

On pratique aussi la replantation de coraux dans les eaux polluées de l’archipel. Selon de nombreuses études, ces écosystèmes favorisent la protection du littoral, quand leur perte en accélère drastiquement l’érosion, menaçant les infrastructures et habitations humaines.

Au total, dix projets (trois en Martinique et sept en Guadeloupe) ont été évalués par l’équipe AdaptOM. « C’est important d’évaluer, de vérifier rapidement » que ces solutions ne sont pas inadaptées, souligne Virginie Duvat, rappelant que les solutions plus lourdes, comme l’enrochement, les constructions de digues ou d’épis pour protéger le littoral, ont souvent montré des effets inverses avec l’accroissement des pressions environnementales.

« Pour l’instant, on se cantonne à mesurer les taux de survie des végétaux qu’on plante et leur rythme de croissance. Or, c’est vital de mesurer à quel point ces écosystèmes restaurés sont capables d’atténuer la houle, de capter des sédiments, voire d’être aussi efficaces que des zones non abimées », a-t-elle martelé aux porteurs de projet, les encourageant à installer des outils de mesures permettant de comparer les données avec des zones non restaurées.

Ce sont des « solutions qui travaillent avec la nature, plutôt que contre elle », a expliqué à l’AFP Astrid Abel, animatrice régionale d’un projet porté par l’Office français de la biodiversité et qui vise à valoriser et renforcer ces méthodes de gestion ou de restauration des écosystèmes, en vue d’adapter les territoires à la crise climatique.

« Ces méthodes sont des solutions du quotidien, qui n’empêcheront pas de grosses modifications du littoral en cas de crise de type ouragan », concède néanmoins Didier Lambert, chargé de la gestion et de l’aménagement pour le Conservatoire du littoral.

Pour les solutions fondées sur la nature, « on n’a pas vraiment, à ce stade, de preuve qu’elles permettent de réduire le risque côtier: toutefois, il manque des données », selon Mme Duvat, notant tout de même de nombreux effets positifs, comme la « réversibilité des aménagement du territoire ou de la gestion des risques » et tout un panel de « co-bénéfices » sur les écosystèmes.

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