Vivement critiquée par la gauche qui a déjà annoncé son refus de la voter, cette mesure-choc a été dévoilée dimanche par le ministre de l’Intérieur et sa collègue déléguée à l’outre-mer lors d’une visite éclair dans l’archipel de l’océan Indien.
« On voit le président tout à l’heure en fin d’après-midi » pour lui faire « un retour de notre déplacement », a déclaré lundi Mme Guévenoux au micro de Franceinfo.
L’exécutif entend engager la révision constitutionnelle nécessaire sans tarder.
« Nous avons plusieurs moments de réforme constitutionnelles possibles », a précisé lundi M. Darmanin, en visite à Rennes. « ll y a des réformes constitutionnelles qui arrivent », qui vont concerner la Nouvelle-Calédonie, l’interruption volontaire de grossesse et la Corse.
« Donc nous avons plusieurs moments de réformes constitutionnelles possibles (…) mais là il appartient au président de la République de choisir son moment puisqu’il en discute avec les forces politiques ».
Sur le terrain, Mayotte restait lundi largement bloquée. Les barges qui relient Grande-Terre et Petite-Terre étaient toujours à l’arrêt et les barrages en place depuis le 22 janvier aux quatre coins du territoire.
« Il est hors de question de lever les barrages pour le moment », a déclaré dans la matinée à l’AFP Safina Soula, la présidente d’un des collectifs de citoyens.
« Nous nous sommes mis d’accord avec le ministre, nous attendons des écrits », a-t-elle précisé. « Nous lui laissons jusqu’à mercredi pour recevoir ce courrier (…) nous verrons si le contenu est conforme à nos attentes ».
Dimanche, Gérald Darmanin a précisé qu’un courrier d’engagement devait être envoyé dès le début de cette semaine au collectif des « forces vives », qui pilote le mouvement, et aux élus locaux.
« J’ai cru comprendre qu’après avoir reçu ce courrier, les barrages seraient levés », a-t-il anticipé.
Sur RTL, la députée de Mayotte Estelle Youssouffa (Liot) a dit espérer « une levée des barrages à partir de mercredi ».
– « Plus de République » –
Département français le plus pauvre de France, Mayotte est peuplé de 310.000 habitants, selon l’Insee – probablement beaucoup plus selon la Chambre régionale des comptes – dont 48% d’immigrés comoriens ou d’autres pays d’Afrique.
La plupart arrivent clandestinement à bord de barques de pêche traditionnelles depuis l’île comorienne d’Anjouan, distante de seulement 70 km. Beaucoup vivent dans des « bangas » (cases) insalubres organisés en bidonville.
Pour tenter d’enrayer ce flux, Gérald Darmanin s’est donc décidé à supprimer le droit du sol, une mesure qu’il a lui-même décrite comme « extrêmement forte, nette, radicale ». « Il ne sera plus possible de devenir français si on n’est pas soi-même enfant de parent français », a-t-il décrit.
Même si elle doit rester « évidemment circonscrite à l’archipel de Mayotte », selon M. Darmanin, la mesure divise déjà largement les oppositions.
« Pour résoudre les problèmes de Mayotte, on n’a pas besoin de moins de République, on a besoin de plus de République, et donc certainement pas le fait d’entamer le droit du sol », a déclaré sur CNews/Europe 1 le député LFI Manuel Bompard.
« C’est un bon début puisque ça fait vingt ans que nous réclamons la suppression du droit du sol pour l’intégralité du pays », a rappelé sur Franceinfo le président du Rassemblement national, Jordan Bardella.
La fin du droit du sol à Mayotte permettra, selon M. Darmanin, de supprimer les titres de séjour territorialisés, un dispositif empêchant les détenteurs d’un titre de séjour mahorais de venir dans l’Hexagone et dont les collectifs d’habitants en colère demandent la suppression.
Le nombre de titres de séjours émis à Mayotte diminuera de 90% avec ces nouvelles mesures et le durcissement du regroupement familial permis par la récente loi immigration, a précisé à l’AFP l’entourage du ministre.
La suppression de ce dispositif sera actée dans un projet de loi Mayotte qui, a précisé lundi Gérard Darmanin, « sera déposé avant l’été à la table du conseil des ministres ».