Le 11 octobre 2013, le centre de coordination des garde-côtes italiens à Rome avait reçu à 12H39 un premier appel au secours d’une embarcation en difficulté avec près de 480 Syriens et Palestiniens à bord, dont une centaine d’enfants.
Pendant plusieurs heures, Rome et La Valette se sont renvoyé la balle: l’embarcation était dans la zone de recherches et de secours de Malte, mais à seulement 60 milles de l’île italienne de Lampedusa et surtout, un patrouilleur italien, le Libra, se trouvait à moins de 45 minutes de là.
Vers 16H00, un avion de reconnaissance de l’armée maltaise a repéré le navire en détresse et tenté en vain d’avertir le Libra. Une heure plus tard, le navire a chaviré.
Une vedette maltaise est arrivée peu après, et le Libra, finalement mobilisé, vers 18H00. Le bilan est lourd: 212 rescapés, 26 morts et plus de 240 disparus, dont une soixantaine de jeunes enfants.
La plainte déposée en Italie par des rescapés est longtemps restée au point mort, jusqu’à ce qu’un documentaire du journaliste Fabrizio Gatti rende publics les enregistrements des échanges entre les services de secours et le navire.
L’apparente indifférence des officiers en charge ce jour-là a relancé la procédure jusqu’au tribunal pénal de Rome, où deux d’entre eux, Luca Licciardi (marine) et Leopoldo Manna (garde-côte) sont mis en examen pour homicides involontaires.
A l’issue d’une audience lundi, la juge chargée de l’affaire a mis sa décision en délibéré au 16 septembre sur l’opportunité d’un procès, qui ne s’ouvrirait alors pas avant un an ou deux.
La question est pourtant de nouveau d’actualité.
Dans les jours qui ont suivi le naufrage, intervenu une semaine après celui qui avait fait 366 morts à Lampedusa, l’Italie a pris de facto la responsabilité des secours dans toute la zone entre la Sicile et la Libye.
Mais depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement populiste en juin 2018, les garde-côtes italiens renvoient de nouveau vers Malte ou la Libye les appels à l’aide n’émanant pas strictement de leur zone de compétence.