Sur le marché européen, le prix du blé oscille légèrement autour des 235 euros la tonne sur l’échéance de décembre, la plus rapprochée, au gré des frémissements de la demande, sans variation d’ampleur.
« Finalement, sur trois semaines, on est toujours au même prix », constate Sébastien Poncelet, analyste spécialiste des céréales au cabinet Agritel (Argus Media).
« On a eu une vague d’optimisme avec des annonces d’achats chinois et des rumeurs sur de possibles importations d’Inde qui ont entraîné un léger rebond des prix. Mais en l’absence de nouveaux éléments et face à une demande faible, tout est retombé », explique-t-il.
– « Nouveau corridor » –
Dans cette situation, l’abondance de l’offre de céréales en provenance de la mer Noire participe à l’écrasement des prix.
L’institut russe d’étude des marchés agricoles (IKAR) vient de relever son estimation de récoltes de céréales à 142,2 millions de tonnes (contre 141,6 début octobre). Les exportations ont aussi été revues à la hausse, à 65 millions de tonnes, contre 64,7 jusqu’ici.
Par ailleurs, le ministre ukrainien de l’Agriculture Mykola Solsky a affirmé lundi soir que son pays avait exporté « 700.000 tonnes de grain » par bateau depuis le mois d’août, via le « nouveau corridor maritime » de la mer Noire.
Au total, rapportent les autorités ukrainiennes, 3,6 millions de tonnes de produits agricoles ont été exportées en septembre, les deux tiers empruntant les voies fluviales via le Danube. Des volumes encore loin des 6 Mt mensuelles espérées par Kiev, mais qui témoignent d’un relatif bon fonctionnement des échanges en dépit du conflit.
« A moins qu’il n’y ait un problème (d’approvisionnement), le blé n’a aucune raison de remonter », résume Jon Scheve, de Superior Feed Ingredients.
Et il n’y a pour le moment « pas de lien direct » entre les cours agricoles et la situation au Moyen-Orient: « Pour l’instant, le marché est prudent et part du principe que le conflit va rester circonscrit à Israël et Gaza », note Arlan Suderman de la plateforme de courtage StoneX.
– Stock record de maïs –
Plus encore que le blé, le maïs est dans une dynamique de repli, sous la pression de la nouvelle récolte qui va venir s’ajouter à des stocks importants.
« Les cours baissent parce qu’il y a trop de maïs » sur le marché, tranche Jon Sheve. Aux Etat-Unis, « on va terminer avec 2 millions de boisseaux de stocks supplémentaires » par rapport au début de la campagne (environ 53 millions de tonnes).
Il estime que le cours « devrait descendre sous 4 dollars le boisseau ». Le contrat de décembre a terminé à 4,84 dollars le boisseau, mardi.
« On n’exporte pas au rythme attendu, donc il n’y a pas de raison pour le maïs de remonter », relève-t-il. « On est à des volumes record » de maïs stocké car les fermiers ne vendent pas. « A un moment, il va falloir qu’ils vendent », ce qui pourrait encore faire baisser les prix dans les mois à venir.
Autre facteur pesant à la baisse: l’arrivée des premières pluies en Argentine, où les semis de maïs ont débuté.
« Le changement attendu d’El Nino, qui apporte de l’humidité, est peut-être en train de se produire en ce moment », remarque Rich Nelson, de la maison de courtage Allendale.
Du côté des oléagineux, la tendance globale reste à la baisse des prix, avec une offre robuste en Asie pour l’huile de palme et des prévisions de récolte exceptionnelles au Brésil pour le soja.
« Le Brésil a un avantage tarifaire de 22 dollars la tonne (de soja) pour les livraisons à court terme, et cela monte à 56 dollars pour les échéances de décembre et janvier », souligne Rich Nelson.
Il voit le soja potentiellement descendre jusqu’à 12,40 dollars le boisseau, ce qui serait son plus bas niveau depuis 2021.
Seul le tourteau de soja, produit dérivé du pressage des graines et destiné à l’alimentation animale, échappe à la spirale baissière. « C’est lié au ralentissement de la trituration (pressage) en Argentine, qui épuise ses réserves de graines après la mauvaise récolte de soja l’an dernier », explique Sébastien Poncelet.