Le canal de Panama, maillon stratégique du commerce mondial, a 100 ans

Le 15 août 1914, après plus de 30 ans de travaux et la mort de 27.000 ouvriers, de paludisme ou de fièvre jaune, ce monument d’ingénierie était enfin inauguré par les Américains. Ils avaient réussi là où les Français, menés par l’ingénieur Ferdinand de Lesseps (père du canal de Suez), avaient échoué entre 1881 et 1904.

« Cent ans de portes ouvertes, pour notre fierté », lit-on sur la façade ancienne des écluses de Miraflores, où s’est déroulée vendredi, sous un soleil ardent, une cérémonie présidée par l’administrateur du canal, Jorge Quijano, en présence de centaines d’employés du canal et d’invités.

« Aujourd’hui, c’est un jour d’opérations comme les autres, car comme tous les jours, 35 navires en moyenne profiteront d’un chemin plus court entre l’Atlantique et le Pacifique », a-t-il déclaré.

En ce jour, « le monde célèbre un siècle d’ingéniosité. Cent ans de triomphe de l’imagination, de l’effort et du sacrifice humain », a de son côté affirmé le président du pays, Juan Carlos Varela, qui a déposé des fleurs dans le cimetière où reposent les ouvriers morts sur le chantier de construction.

Il y a 100 ans, l’ouverture de ce passage avait révolutionné le commerce mondial, permettant d’abord aux Etats-Unis de déplacer sa flotte militaire et commerciale d’une côte à l’autre, avant de devenir un maillon essentiel pour les échanges entre l’Europe, l’Amérique latine et l’Asie.

Le canal « est né comme une enclave coloniale et aujourd’hui, c’est un moteur de développement », commente ainsi l’analyste José Isabel Blandon.

Chaque année, le long des rives où foisonne une jungle luxuriante, 14.000 bateaux entament une lente traversée qui dure en moyenne 10 heures, puis rejoignent 1.700 ports dans 160 pays.

Le petit pays d’Amérique centrale, placé sur la carte du monde grâce à cette voie, par où transite 5% du commerce maritime mondial, en a récupéré la gestion des Etats-Unis le 31 décembre 1999.

– Retard dans l’élargissement –

Désormais c’est lui qui est chargé de la prochaine étape : l’élargissement.

Un chantier pharaonique, démarré en 2007 et d’un budget de plus de quatre milliards d’euros, qui équipera le canal d’un troisième jeu d’écluses, permettant le passage de navires transportant 12.000 à 15.000 conteneurs, contre 5.000 actuellement, pour doubler le transit à 600 millions de tonnes/an.

Le projet, déjà accompli aux trois-quarts, accumule un retard de plus d’un an : prévu pour célébrer dignement ce 100e anniversaire, il ne devrait finalement être mis en service qu’en 2016, ralenti notamment par une dispute avec le consortium chargé des travaux, dirigé par l’espagnol Sacyr, qui réclamait une rallonge financière.

Mais d’ores et déjà un quatrième jeu d’écluses est à l’étude, pour augmenter encore la capacité du canal : « Nous n’arrêtons jamais de penser à comment innover et rénover notre canal, car à partir du moment où l’on s’endort, quelqu’un nous passe devant », explique Jorge Quijano.

Une claire allusion à la concurrence, notamment de Suez, dont la plus grande capacité « a sapé lentement les revenus » de Panama, affirme-t-il, et qui prévoit en outre de s’agrandir d’ici un an.

Et au Nicaragua, une compagnie chinoise prétend construire un canal entre le Pacifique et les Caraïbes, trois fois plus long que celui du Panama et pouvant accueillir des navires de 12.000 à 25.000 conteneurs. Il est attendu d’ici cinq ans.

« Nous espérons que l’agrandissement (du canal de Panama) se terminera avec succès, mais il y a des risques qu’en cas de nouveaux retards, les coûts augmentent ou que le canal perde des clients face au développement de routes alternatives », explique à l’AFP le politologue et historien Carlos Guevara Mann.

Or la santé du canal est vitale pour l’économie du pays, une des plus dynamiques de la région avec une croissance de 8,4% en 2013.

Avec comme principaux clients sont la Chine et les Etats-Unis, il rapporte un milliard de dollars par an aux caisses de l’Etat, 10% des recettes fiscales. Il représente 6% du PIB et 10.000 emplois.

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SACYR

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