Les eaux britanniques riches en poissons, ultime monnaie d’échange du Brexit

Bruxelles, 6 mai 2021 (AFP) – Selon l’accord de pêche négocié fin décembre dans le cadre du Brexit, l’accès des pêcheurs européens aux eaux britanniques doit être maintenu, mais avec des restrictions accrues et l’épée de Damoclès de renégociations annuelles à partir de 2026 — alors que l’accès à ces zones très poissonneuses est crucial pour leur activité.

Des eaux riches en poissons

Les eaux britanniques sont riches en ressources halieutiques, du fait de mécanismes biologiques.

Les oeufs de poissons s’installent le long des côtes françaises et jusqu’au Danemark, zones nourricières car assez peu profondes et sableuses. « Quand ils deviennent adultes, ils partent vers les eaux un peu plus profondes, plus froides et plus oxygénées du nord », selon l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer). Dans les eaux britanniques, donc.

Un phénomène accentué par le changement climatique et particulièrement sensible pour le cabillaud et la plie, espèces très présentes en mer du Nord.

La Manche, où se trouvent les îles anglo-normandes et notamment Jersey, est une zone de transition entre l’océan Atlantique et la mer du Nord et constitue une « succession d’habitats spécifiques » pour certaines espèces, selon l’Ifremer.

Parmi elles, de nombreux crustacés comme l’araignée de mer, le homard, le tourteau ou le bulot.

Un accès vital pour les pêcheurs de l’UE

Un quart des prises françaises en volume (environ 20% en valeur) proviennent des eaux britanniques. La dépendance est encore plus forte pour la Belgique (50% de ses prises en valeur), l’Irlande (35%), le Danemark (30%) et les Pays-Bas (28%), selon des chiffres 2011-2015. Espagne, Allemagne et Suède sont aussi concernées pour une part moins importante.

Les principales espèces sont des poissons pélagiques (de haute mer): hareng, maquereau, merlan…. auxquelles s’ajoutent quelques espèces démersales (proches des fonds): sole, plie, lieu noir.

Au niveau commercial, le Royaume-Uni exporte entre 60% et 80% de ses produits de la mer et l’UE absorbait l’an dernier presque 70% des exportations britanniques de poissons.

Le partage de la ressource

Les prises des pêcheurs de l’UE dans les eaux britanniques pèsent quelque 650 millions d’euros chaque année. Les flottes de huit pays de l’UE capturent au total 40% en valeur des prises effectuées dans la zone économique exclusive britannique, selon un rapport du Parlement européen. La Norvège y est aussi présente.

Dans le cadre de l’accord post-Brexit conclu à la veille de Noël dernier, les flottes européennes renonceront à 25% de leurs captures dans les eaux britanniques à l’issue d’une période de transition courant jusqu’en juin 2026. Cet accès des pêcheurs européens sera ensuite renégocié annuellement.

Cela « accroîtra d’environ deux tiers les prises des pêcheurs britanniques dans les eaux du Royaume-Uni », précisait à l’époque un document de Downing Street.

Par ailleurs, les pêcheurs de l’UE conservent jusqu’en 2026 l’accès avec une licence aux zones situées dans les 6-12 milles marins, un accès qui sera là aussi renégocié chaque année à l’issue de la transition.

Cette perspective de discussions annuelles sur les quotas de pêche et l’accès des bateaux européens suscite l’inquiétude du secteur, qui estime que cela empêchera toute visibilité et bloquera les investissements dans des bateaux et infrastructures nécessitant un amortissement sur le long terme.

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