Mise au pas des pêcheurs en Thaïlande, de crainte de sanctions de l’UE

Thon, surimi, crevettes… Une partie des produits de la mer qui se retrouvent sur les tables des consommateurs européens, à l’autre bout de la chaîne, vient de Thaïlande, troisième producteur mondial.

Jusqu’ici peu de bateaux de pêche respectaient la réglementation. La Thaïlande a désormais mis en place un contrôle plutôt strict des bateaux, avec notamment des vérifications à l’entrée et à la sortie des ports.

Ce durcissement est dénoncé par les acteurs du secteur qui pointent du doigt la précipitation et les méthodes au forceps de la junte militaire au pouvoir depuis mai 2014.

Elle a mis en place « trop de règles, en trop peu de temps », se désespère, sous couvert de l’anonymat, le propriétaire d’un bateau de pêche rencontré à Samut Sakhon, le plus grand port de pêche de Thaïlande.

Aphisit Techanitisawad, représentant d’un importante association d’industriels, estime à 3.000 le nombre de bateaux n’ayant pas pu prendre la mer mercredi.

Selon les dernières données disponibles, la marine a répertorié au 25 juin près de 21.000 bateaux de pêche et plus de 7.000 non enregistrés.

« Environ 80% des pêcheurs reviennent à terre pour se consacrer aux procédures d’enregistrement », assure Aphisit à l’AFP, dans son usine de transformation de poisson de Samut Sakhon.

Une récente pénurie de poisson frais l’a obligé à arrêter temporairement de produire des bâtonnets de surimi à destination du marché français.

A la place, maquereaux et sardines congelés sont pour l’heure conditionnés, à destination de marchés voisins, vers la Birmanie et le Cambodge.

Parmi les pêcheurs n’ayant pas pu s’enregistrer à temps, la grogne s’exprime.

« Nous allons devoir continuer à payer les factures sans revenus », s’inquiète le même propriétaire de bateau de 59 ans, alors que s’activent autour de lui des travailleurs immigrés du Cambodge et de la Birmanie voisines, main d’oeuvre bon marché très souvent utilisée dans le secteur.

Plus généralement, ce sont tous les travailleurs immigrés qui doivent désormais avoir des titres de séjour.

Le ministère du Travail a annoncé mercredi que 80.000 travailleurs immigrés étaient désormais enregistrés dans le secteur de la pêche.

– Carton rouge ? –

Dans un contexte économique morose pour la Thaïlande, Bruxelles lui a décerné en avril un « carton jaune », procédure pouvant déboucher sur la fermeture du marché européen aux exportations thaïlandaises de produits de la pêche, en particulier thon et crevettes.

Celles-ci ont représenté quelque 642 millions d’euros en 2014. Le passage à un « carton rouge » serait catastrophique pour l’image du royaume même si l’impact économique serait limité puisque seulement 3 à 5% de ses produits de la mer sont exportés vers l’Europe.

Bruxelles a donné six mois à Bangkok, soit jusqu’à octobre en théorie, pour mettre en place « un plan d’action correctif ».

D’où la hâte du régime à montrer sa mise au pas d’un secteur accusé de trafic d’êtres humains, d’esclavage, et de captures illégales.

Bruxelles a déjà fermé depuis mars 2014 son marché aux produits de pêche du Cambodge, de la Guinée et du Sri Lanka, dans le cadre de sa lutte contre la pêche illégale. La Corée du Sud et les Philippines avaient réussi quant à elles à éviter le carton rouge.

L’arme économique pourrait se révéler efficace pour obliger la Thaïlande à agir.

Mais la mise en place à la hâte de régulations ne permettra pas de combattre la pêche illégale sur le long terme, estiment certains analystes.

Car sans quota strict du nombre de bateaux autorisés à pêcher, il y a un « risque que soient régularisés plus de bateaux que les eaux thaïlandaises ne peuvent en supporter », alors même qu’elles sont déjà victimes de surpêche, met en garde Daniel Murphy, de l’ONG Environmental Justice Foundation.

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