Le ministère russe de la Défense a cependant publié dans la soirée les noms des 14 officiers, soulignant qu’ils avaient sauvé « au prix de leur vie » les autres membres d’équipage et le « submersible d’immersion profonde » à bord duquel ils se trouvaient, sans autre précision.
Cet accident a ravivé en Russie le souvenir de la tragédie du Koursk, qui avait coulé en août 2000 avec 118 hommes à bord et profondément traumatisé le pays. Ce drame avait jeté une ombre sur le premier mandat de Vladimir Poutine, élu quelques mois auparavant et dont la gestion de l’affaire avait été critiquée.
L’ambassade des Etats-Unis en Russie a exprimé mercredi ses « profondes condoléances » aux familles des sous-mariniers morts dans l’accident.
– Le déroulement des faits –
Mardi en milieu d’après-midi, le ministère russe de la Défense avait annoncé que 14 sous-mariniers étaient décédés la veille après avoir inhalé des fumées toxiques au cours d’un incendie finalement maîtrisé.
Selon l’armée, l’accident a eu lieu dans les eaux territoriales russes. Les autorités ont décrit l’appareil comme un sous-marin de recherche, destiné à l’étude des environnements marins et du fond des océans.
Moscou précise que le sous-marin est retourné à son port d’attache, la ville fermée de Severomorsk, dans la région de Mourmansk, dans l’Arctique. « Les informations ne peuvent pas être rendues publiques. C’est complètement normal », a assuré mercredi le porte-parole du Kremlin, invoquant le « secret d’Etat ».
Présidant une réunion à Severomorsk, le ministre de la Défense Sergueï Choïgou a confirmé mercredi qu’il y avait des survivants parmi l’équipage, notamment un civil « représentant de l’industrie ».
– De quel sous-marin s’agit-il ? –
Vladimir Poutine a qualifié l’appareil d' »inhabituel ». Selon les médias russes, le submersible en question est un petit sous-marin nucléaire, le AS-12 ou AS-31 selon les versions, ce qui correspond dans les deux cas au type surnommé « Locharik », un engin secret destiné à des opérations spéciales et pouvant plonger jusqu’à 6.000 mètres de profondeur.
Le « Locharik », qui peut accueillir jusqu’à 25 marins à son bord, est conçu de façon à s’amarrer à un sous-marin plus imposant qui le transporte jusqu’à sa zone d’opération.
« Avec son bras articulé, il est capable d’interagir avec le fond de la mer (…). C’est aussi lui qui est chargé d’aller piéger des câbles sous-marins. Il peut poser des stations d’écoute sous l’eau, donc faire des missions très sensibles », indique Igor Delanoë, directeur adjoint de l’Observatoire franco-russe et spécialiste de la marine russe.
Selon lui, ce type de submersible a ainsi été utilisé en 2012 « pour réaliser des prélèvements du plateau continental dans le sous-sol de l’Arctique », pour que la Russie puisse plaider à l’ONU pour l’élargissement de ses frontières dans la région.
Sur place à Severomorsk mercredi, Segueï Choïgou a ordonné la « réparation rapide de l’appareil et son retour en eaux profondes », selon les agences russes.
– « L’élite de la flotte sous-marine » –
Ce type de sous-marins est rattaché à la Direction des plongées en eau profonde du ministère de la Défense, une division spéciale et « complètement autonome » de la Marine russe.
« C’est une des branches les plus secrètes, les plus entourées de mystère de la marine russe », soutient Igor Delanoë, selon qui « elle dispose de l’élite de la flotte sous-marine russe: les plongeurs les plus qualifiés, les hommes les plus expérimentés, les plus entraînés ».
En présentant ses condoléances aux proches des marins, Vladimir Poutine a d’ailleurs précisé mardi soir que deux « Héros de la Russie » et sept capitaines de premier rang, le grade le plus élevé chez les officiers navigants de la marine russe, comptaient parmi les morts.
Sur les réseaux sociaux, le gouverneur de Saint-Pétersbourg Alexandre Beglov a assuré que les sous-mariniers « étaient en poste sur une de nos bases ». Ils seront enterrés à Cronstadt, a assuré au quotidien RBK le représentant de la cathédrale de cette île sur le golfe de Finlande, qui compte une importante base navale.
Selon le journal Kommersant, les sous-mariniers étaient en poste sur la base navale 45707 à Petergof, près de Saint-Pétersbourg: une base navale rattachée, selon le quotidien, à la Direction de la plongée profonde du ministère de la Défense.