Négociations compliquées à la ministérielle de l’OMC sur la pêche et l’agriculture

Abou Dhabi, 26 fév 2024 (AFP) – Les négociations à la conférence ministérielle de l’OMC à Abou Dhabi sur la pêche et l’agriculture entrent dans le vif du sujet mardi mais elles s’annoncent difficiles, avec en ligne de mire l’Inde dont l’arrivée du ministre se fait attendre.

Les 164 membres de l’Organisation mondiale du commerce sont réunis cette semaine dans la capitale des Emirats arabes unis pour leur rencontre bisannuelle, sans claire perspective de résultats.

Après les déclarations officielles des ministres lundi, les négociations vont officiellement démarrer mardi, en premier lieu sur la pêche et l’agriculture.

« Nous espérons tous pouvoir nous mettre d’accord sur une mesure qui réduira les subventions et contribuera à mettre un terme à la surpêche et à la surcapacité de la flotte de pêche. Ce serait un très bon résultat. Nous n’en sommes pas loin. Il faut donc un peu de compromis, un peu de volonté politique pour donner l’impulsion finale », a indiqué à l’AFP une source diplomatique.

Contrairement à d’autres accords de l’OMC visant à lever les barrières commerciales ou à lutter contre les distorsions commerciales, ce texte – tout comme l’accord de 2022 – s’inscrit dans le cadre des objectifs de développement durable de l’ONU.

Le projet de texte prévoit une interdiction des subventions favorisant la surpêche et la surcapacité sauf si elles entrent dans le cadre d’un mécanisme de gestion de la ressource halieutique basée sur des critères de durabilité.

Les ONG sont partagées, même si elles sont nombreuses à affirmer que c’est un pas dans la bonne direction.

« Une interdiction claire assortie d’un nombre réduit d’exemptions serait probablement la meilleure solution », a déclaré à l’AFP Ernesto Fernandez Monge, de l’ONG Pew Charitable Trusts, soulignant toutefois qu' »il est plus important d’avoir un accord que de ne pas en avoir ».

En 2022, un premier accord avait été arraché après plus de vingt ans de discussions pour interdire les subventions à la pêche INN (illicite, non déclarée et non réglementée), à la pêche des stocks surexploités et à la pêche en haute mer non réglementée, tout en incluant des flexibilités pour les pays en développement.

L’accord n’est pas encore entré en vigueur car un nombre insuffisant de pays l’ont ratifié.

Conclure la deuxième vague de négociations sur la pêche est une « priorité », a souligné une source diplomatique française, avant d’ajouter: « On a quelques sujets de sensibilité, quelques discussions à avoir, notamment avec l’Inde et avec certains pays, mais on est relativement confiants sur nos capacités à enfin sceller cet accord à la 13e conférence ministérielle ».

– Pêche artisanale –

Le texte répartirait pour l’essentiel les pays membres en trois groupes, les plus grands pourvoyeurs de subventions, y compris s’il s’agit de pays en développement, étant soumis à des règles plus strictes.

Des flexibilités seraient accordées aux autres pays en développement, et l’Inde demande une période de transition – 25 ans – jugée par certains trop longue.

« Ce serait bien de conclure la deuxième vague » de négociations car cela permettrait de protéger les stocks de poissons et d’atteindre un des objectifs de développement durable de l’OMC, a indiqué un délégué chargé des questions commerciales.

Outre la question de la « période de transition », il a souligné que la limite géographique jusqu’à laquelle la pêche est considérée comme « artisanale », et donc exemptée des règles, pose problème.

Le dossier agricole, hautement sensible comme l’ont montré les récentes manifestations d’agriculteurs en Europe et en Inde, sera également âprement négocié, mais les attentes sont très faibles.

Pour l’instant, « nous ne sommes pas parvenus à une convergence sur le texte », a indiqué aux journalistes le directeur de la division agriculture à l’OMC, Edwini Kessie.

Les ministres ne devraient même pas se mettre d’accord sur un programme de travail. La directrice générale de l’OMC, Ngozi Okonjo-Iweala, les a pourtant presque suppliés de le faire.

« Étant donné le caractère central de la question cette semaine, je vous implore de parvenir à un résultat en matière d’agriculture même s’il s’agit d’établir une plateforme » en vue de discussions ultérieures, a-t-elle dit.

« La question la plus difficile est celle des stocks publics de denrées alimentaires », pour assurer la sécurité alimentaire des populations, a indiqué M. Kessie.

Plusieurs pays, l’Inde en tête, demande qu’un accord temporaire à ce sujet trouvé en 2013 devienne permanent.

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