Petit tour d’horizon des enjeux de cette négociation.
– Une OMC sous pression
L’OMC est la seule organisation capable d’élaborer et de faire respecter des accords mondiaux pour limiter les subventions qui distordent la concurrence, elle s’est donc vu confier la tâche de fixer des règles relatives aux subventions à la pêche.
L’élaboration de disciplines relatives aux subventions à la pêche fait l’objet de travaux à l’OMC depuis le lancement du Programme de Doha pour le développement en 2001. L’adoption par les dirigeants mondiaux des Objectifs de développement durable (ODD) de l’ONU en septembre 2015 a permis de prendre conscience avec plus d’acuité de l’urgence des discussions.
Les négociations se sont accélérées ces derniers mois, mais les pays membres ont tout de même échoué à trouver un accord avant la date limite de fin 2020 que l’ONU avait fixée dans les ODD. Malgré cela, la nouvelle directrice de l’OMC, la Nigériane Ngozi Okonjo-Iweala, a fait de cet accord l’une de ses priorités, et elle espère que les pays trouveront « rapidement » un accord cette année.
– Des stocks de poissons menacés…
Selon les dernières données de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, les stocks de poissons risquent de s’effondrer dans de nombreuses régions du monde en raison de la surexploitation.
34% des stocks mondiaux sont surexploités, contre 10% en 1974, ce qui signifie qu’ils sont exploités à un rythme tel que la population de poissons ne peut pas se reconstituer, rapporte l’OMC.
La diminution des stocks de poissons menace d’aggraver la pauvreté et de mettre en danger les communautés côtières tributaires de la pêche. Environ 39 millions de personnes dans le monde dépendent de la pêche de capture pour leur subsistance, selon l’organisation internationale.
« Des mers en bonne santé sont également importantes pour la sécurité alimentaire, le poisson fournissant en moyenne 20% des besoins en protéines animales pour 3,3 milliards de personnes », explique-t-elle.
– … par les subventions
En théorie, la pêche devrait être limitée par son environnement même: la faiblesse des stocks de poissons devrait signifier que la pêche prend plus de temps et coûte plus cher.
Le problème, toutefois, est que, très souvent, le financement public maintient en mer des flottes de pêche non rentables, constate l’OMC.
Certaines de ces subventions encouragent donc la pêche dite « illicite, non déclarée et non réglementée » et contribuent à la surcapacité et à la surpêche.
L’OMC estime que les subventions mondiales à la pêche dans leur ensemble peuvent s’élever à jusqu’à 54 milliards de dollars par an (45,6 milliards d’euros).
Selon une étude publiée fin juin par l’ONG Oceana, la Chine, le Japon, la Corée du Sud, la Russie, les Etats-Unis, la Thaïlande, Taïwan, l’Espagne, l’Indonésie et la Norvège sont les 10 plus grands pourvoyeurs de subventions à la pêche préjudiciables, pour un montant total de 15,4 milliards de dollars (les dernières données disponibles datant de 2018).
L’Union européenne, prise dans son ensemble, octroie selon l’ONG, 2 milliards de dollars de subventions préjudiciables, ce qui la placerait en troisième position, derrière la Chine (5,9 milliards de dollars) et le Japon (2,1 milliards de dollars).