En 2017, lors d’un comité local des usagers des ports de plaisance, un couple qui avait rapatrié son voilier de 11 mètres depuis un port normand vers Marseille révélait publiquement avoir versé 30.000 euros pour obtenir un poste à flot, alors qu’une liste d’attente ne leur laissait pas espérer obtenir un anneau avant six à dix ans.
Ce pot de vin avait été réglé en huit versements de plusieurs milliers d’euros entre décembre 2009 et mai 2012, à un agent portuaire dénommé « Robert ». Les paiements se faisaient en liquide, dans des bars, sur les pannes du port ou sur la navette reliant le Vieux-Port au Frioul.
Les propriétaires du voilier avaient été conduits par « Robert » auprès du maître du port qui leur avait proposé de racheter fictivement un bateau à l’état d’épave ayant une place dans le port, avant d’opérer des manipulations informatiques afin de faire apparaître le couple comme attributaire de cette même place.
Ce maître du port avait déjà été impliqué, il y a une quinzaine d’années, dans des affaires d’attributions frauduleuses de postes sur le port du Frioul, puis avait fait l’objet d’une enquête administrative en 2014, avait indiqué, à l’audience, l’avocat de la Métropole, partie civile.
Le procureur Jean Moineville avait requis la condamnation des deux fonctionnaires territoriaux à douze et dix-huit mois de prison avec sursis et une interdiction des droits civiques durant trois ans: « Il est impératif de (lutter contre) ces infractions-là, pour que le citoyen ne perde pas confiance dans le système et dans sa capacité à rendre justice », avait-il estimé dans son réquisitoire.
« C’est fini, ce système de passe-droits », avait lancé dans sa plaidoirie l’avocat de la Métropole, selon qui « tous les faits seront portés à la connaissance du procureur ».
Vendredi le tribunal a alloué 7.500 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral à la collectivité territoriale, néanmoins reconnue partiellement responsable en raison de dysfonctionnements du contrôle du logiciel de gestion des ports à l’époque.
« Si on est dans un pacte de corruption, pourquoi n’avons-nous que les corrompus devant le tribunal correctionnel ? », avait questionné Me Pierre Bruno, défenseur d’un des prévenus.
Le tribunal a ordonné l’affichage d’un communiqué résumant son jugement durant deux mois, à l’été 2024, dans les capitaineries des ports du Vieux-Port, de la Pointe Rouge et du Frioul.