« La vulnérabilité des régions tropicales au changement climatique explique l’importance de limiter la montée du mercure », explique William Cheung, professeur adjoint à l’Institute for the Oceans and Fisheries de l’Université de Colombie britannique (UBC) à Vancouver, au Canada.
« Les pays situés dans ces zones sensibles sont très dépendants de la pêche pour des raisons économiques et aussi pour se nourrir, mais toutes les nations seront affectées car cette activité est mondialisée », ajoute-t-il.
L’industrie de la pêche pèse près de 150 milliards de dollars dans le monde et est de plus en plus cruciale pour nourrir la population croissante de la planète.
Les chercheurs ont simulé avec un modèle mathématique l’impact de différentes hausses de température sur les 892 espèces de poissons et d’invertébrés pêchés dans le monde.
Avec une hausse de 3,5 degrés, qui correspond au rythme actuel, le potentiel maximum de prises serait réduit de 8% à l’échelle mondiale et de seulement 2,5% avec 1,5 degré.
L’étude indique aussi que pour chaque degré de réchauffement en moins, les prises pourraient augmenter de plus de trois millions de tonnes par an.
La production annuelle de l’industrie mondiale de la pêche est actuellement d’environ 109 millions de tonnes, selon des experts de l’Université de Colombie britannique.
« Les changements dans les océans affectant les populations de poissons, comme la température et la concentration d’oxygène et de CO2, sont très étroitement liés au réchauffement atmosphérique et aux émissions carboniques », souligne Thomas Frölicher, de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich, en Suisse.
Les scientifiques ont déterminé que pour chaque tonne métrique de dioxyde de carbone (CO2) rejetée dans l’atmosphère, le potentiel maximum de prises de pêche diminue dans d’importantes proportions.
– Une réduction de 47% des prises –
Le changement climatique va ainsi probablement forcer des poissons à migrer vers des eaux plus froides pour survivre, ce qui aura un impact notable sur les quantités et les espèces pêchées à travers le monde.
Certaines régions seront affectées plus durement si le scénario d’un réchauffement de 3,5 degrés se concrétise.
Ainsi, le potentiel maximum de prises pourrait chuter de 47% dans la zone très peuplée Indo-Pacifique (golfes du Bengale et de Thaïlande, Mer de Chine méridionale, mers de Sulu et de Célèbes).
Les auteurs espèrent que ces résultats vont inciter davantage de pays, au niveau gouvernemental comme dans le secteur privé, à accroître leurs engagements et leurs actions afin de réduire les émissions de gaz à effets de serre, principaux responsables de la hausse de la température.
« Si l’un des plus gros émetteurs de CO2 dans le monde se retirait de l’accord de Paris, les efforts des autres pays seraient sans aucun doute affaiblis », a mis en garde Gabriel Reygondeau, chercheur à l’Université de Colombie britannique, faisant allusion au président élu américain Donald Trump qui, pendant sa campagne, a menacé d’en retirer les Etats-Unis, deuxième plus gros émetteur de gaz à effet de serre après la Chine.