Mardi à la Bourse de Chicago, les cours du soja sont tombés à leur plus bas niveau depuis plus de deux ans. Le prix du contrat rapproché avec échéance en janvier est descendu à 12,2875 dollars le boisseau (environ 27 kg), une première depuis début décembre 2021.
Ce reflux est lié, d’une part, au retour de la pluie dans les grandes régions de production brésiliennes, après des mois de précipitations insuffisantes, et, d’autre part, au ralentissement des achats chinois aux Etats-Unis.
Les volumes hebdomadaires américains inspectés avant exportation, indicateur très suivi par le marché, sont en baisse de 30% pour la semaine achevée le 4 janvier par rapport à la semaine précédente, mais aussi divisés par deux (-53%) par rapport à la même période de 2023.
– Concurrence sud-américaine –
Désormais premier producteur et exportateur mondial de soja, le Brésil attend une récolte monstre, estimée par le ministère américain de l’Agriculture (USDA) à 161 millions de tonnes.
« Ils ont de la pluie, mais on est toujours sur la campagne la plus sèche qu’on ait vue en 40 ans. Dans le Mato Grosso (principal Etat de production au Brésil), la dernière fois qu’on a eu des conditions comme celles-là, les rendements ont chuté de 10% », tempère cependant Jon Scheve, de la société de conseil Superior Feed Ingredients.
Mais, même si la production brésilienne est prochainement revue en baisse, « la récolte globale sud-américaine de soja s’annonce supérieure à celle de l’année dernière », souligne Sébastien Poncelet du groupe Argus Media France (Agritel).
Selon les estimations actuelles de l’USDA, les productions des trois principaux pays exportateurs sud-américains (Brésil, Argentine et Paraguay) sont attendues à 219 millions de tonnes en 2023-24, contre 194 millions de tonnes l’année précédente, grâce au bond attendu de la récolte argentine.
Dans ce contexte, Rich Nelson, de la maison de courtage Allendale, s’inquiète du risque d’annulations de commandes américaines, notamment de la Chine, face à un Brésil « beaucoup plus compétitif » sur le plan des prix.
Les Etats-Unis « ont fait de belles ventes, supérieures à ce qu’attendait l’USDA. Mais les livraisons posent question », ajoute-t-il, évoquant des retards de livraison en partie liés aux restrictions de navigation sur le canal de Panama.
– « Domination de la mer Noire » –
Côté céréales, les cours du blé continuent à évoluer dans une faible fourchette, du fait d’une offre mondiale abondante et d’une concurrence toujours rude.
« Jusqu’ici, les craintes sur le niveau de la demande tiraient les cours vers le bas, mais l’attention se tourne maintenant vers l’offre et les conditions météorologiques. Du coup, il y a un mouvement de couverture en cours », les acteurs spéculatifs rachetant du blé après avoir été positionnés à la baisse, observe Michael Zuzolo de Global Commodity Analytics and Consulting.
Sur le marché européen, le blé est tombé lundi à 217,25 euros la tonne en séance, sur l’échéance la plus rapprochée (mars), au niveau de juillet 2021. En dépit d’un léger rebond mardi, les cours des céréales restaient hésitants mercredi sur Euronext.
Les acheteurs ont profité de ce reflux pour revenir aux achats, dans des échanges toujours dominés par les produits de la mer Noire. L’Egypte a acheté mardi 360.000 tonnes de blé russe et 60.000 tonnes de blé ukrainien pour un prix compris entre 282 à 285 dollars la tonne, chargement et fret compris. L’offre française, transport compris, était 20 dollars plus chère, relève le cabinet Inter-Courtage.
La Jordanie, l’Algérie et la Tunisie ont aussi lancé des appels d’offre pour des céréales (blé tendre, blé dur, maïs et orge).
« La domination de la mer Noire reste indiscutable », relève Sébastien Poncelet, qui, outre le rythme soutenu des exportations russes, observe « une accélération des chargements dans les ports ukrainiens de la zone d’Odessa » pour du blé comme du maïs.