Mardi, les ministres des Affaires étrangères des 28 ont mandaté la Commission européenne de finaliser un document sur d’éventuelles sanctions destinées à frapper plusieurs secteurs de l’économie russe. Il a été transmis mercredi soir aux capitales des Etats membres.
Jeudi, les ambassadeurs des 28 étaient réunis à Bruxelles pour évaluer les différentes options. Aucune décision ne sera prise, et une nouvelle réunion est prévue mardi prochain, a-t-on appris de sources européennes.
Toute décision requiert l’unanimité des Etats membres. Si certains poussent depuis des semaines à l’adoption de sanctions d’envergure contre l’économie russe, d’autres se sont toujours montrés réticents par crainte des conséquences sur leur propre économie.
Les ambassadeurs doivent en revanche décider de renforcer le volet des sanctions ciblées, celui des personnalités et entités visées par une interdiction de voyager dans l’UE et un gel des avoirs. Ils doivent ajouter de nouveaux noms à la liste, qui compte déjà 72 personnalités russes ou ukrainiennes pro-russes. La liste devrait être publiée vendredi ou samedi.
Sur les éventuelles sanctions économiques, le document aborde en détail l’accès aux marchés financiers, mais aussi la défense, les biens dits à double usage civil et militaire, et les technologies sensibles notamment dans le domaine de l’énergie.
Le secteur financier serait le plus touché. La Commission envisage l’interdiction pour toute personne de l’UE d’investir dans des titres de dette et des actions émis par des institutions financières russes détenues à plus de 50% par l’Etat, selon le FT. L’an dernier, quelque 7,5 milliards d’euros d’obligations auraient été émises par ces banques sur les marchés européens.
Bruxelles suggère aussi d’empêcher les banques russes d’émettre de nouveaux produits financiers sur les places financières européennes pour les empêcher de contourner les sanctions en levant des fonds auprès de non-Européens, notamment via la City de Londres.
Ces sanctions iraient donc beaucoup plus loin que celles des Etats-Unis, qui ont décidé la semaine dernière d’ajouter à leur liste de sanctions Gazprombank, la banque du géant gazier Gazprom, et la banque publique russe VEB.
Le document propose aussi l’interdiction d’exporter des « technologies sensibles », notamment dans le secteur stratégique pour l’économie russe de l’énergie. Selon le FT, trois types d’équipement fournis par les Européens seraient visés: les forages en eaux profondes, l’exploration dans l’Arctique et l’extraction de gaz de schiste.
Une autre option consiste en un embargo sur les ventes d’armes, même si les exportations européennes vers la Russie sont dix fois moins élevées que celles de la Russie vers les pays de l’UE. Alors que la France insiste pour livrer le premier navire porte-hélicoptère Mistral à la Russie, la Commission préconise d’exempter les contrats existants et de limiter la mesure aux futurs contrats.
S’agissant des biens à double usage, qui représenteraient chaque année quelque 20 milliards d’exportations de l’UE vers la Russie, la Commission recommande de se concentrer sur quatre secteurs, dont les « matériaux spéciaux », certaines machines-outils et l’électronique de haute performance.