En 1994, le regretté professeur Hervé Coutau-Bégarie fondait l’Institut de stratégie comparée. Pourquoi comparée ? Les procédés de la stratégie ne sont-ils pas universels ? Non, et pour au moins trois raisons.
Ils sont en premier lieu façonnés par l’histoire et la géographie ; et quand bien même certains auraient une ambition d’universalité, comme la bataille décisive mahanienne, ils ne font jamais l’objet d’un consensus total. Ainsi, à chaque évolution technique majeure, les théories de l’amiral Aube sur la vulnérabilité du capital-ship refont surface et font de nouveau l’objet de débats enflammés.
Ensuite, ces procédés se nourrissent de l’observation et du débat d’idées. Par exemple, les opérations contre le commerce combinant forces de surface, sous-marins et avions, mises en œuvre par les Allemands en 1940-1941, étaient largement influencées par les théories du Français Raoul Castex.
Enfin, parce qu’il n’y a pas de stratégie sans adversaire, sans friction, sans confrontation. Et que pour gagner, il faut d’abord observer la stratégie de ses compétiteurs potentiels, les jauger, et enfin savoir adapter la sienne en conséquence. Voilà au moins trois raisons pour lesquelles l’observation et la remise à jour régulière de la stratégie des principaux acteurs océaniques est une œuvre indispensable, dont s’acquitte avec brio ce numéro d’Études marines.