Les rebelles houthis, qui contrôlent de vastes régions du Yémen, mènent ces attaques. Ils affirment agir en solidarité avec les Palestiniens dans la bande de Gaza, où Israël mène une guerre contre le Hamas en représailles à l’attaque sans précédent du 7 octobre sur le sol israélien.
QUESTION: A quel point ces attaques préoccupent l’Organisation mondiale du commerce ?
REPONSE: « La crise en mer Rouge est un sujet qui nous préoccupe, nous surveillons la situation. Environ 12% du commerce mondial passe par le canal de Suez, ainsi qu’un tiers des cargaisons de conteneurs de la Chine vers l’Europe.
C’est donc clairement quelque chose que nous devons surveiller. Cela dit, je pense que pour l’instant, l’impact macroéconomique semble modéré, ce qui s’explique par le fait que la demande en Europe est relativement faible et que les capacités de transport maritime sont suffisantes.
Les taux de fret ont augmenté, mais ils sont loin d’être aussi élevés que lors de leur pic en 2021, lors de la pandémie. La situation est donc globalement difficile et nous la suivons de près, mais pour l’instant les effets semblent modérés. »
Q: Que voulez-vous dire par des capacités suffisantes de transport maritime ?
R: « Il peut y avoir parfois une pénurie de conteneurs ou de navires.
Dans le cas de la crise en mer Rouge, de nombreux navires, au lieu de passer par le canal de Suez, contournent le cap de Bonne-Espérance, ce qui rallonge la durée du voyage et nécessite qu’un plus grand nombre de navires naviguent au même moment. Mais il semble que les capacités de transport maritime soient suffisantes actuellement. »
Q: Quelle est votre analyse des risques ?
R: « Le grand risque que je vois est que, d’une manière ou d’une autre, les prix augmentent et commencent à se répercuter sur les marchés de l’énergie, ce qui pourrait alors avoir des effets significatifs sur les perspectives (économiques) mondiales.
Il faut se poser la question : en quoi cette crise représente-t-elle un risque pour l’économie mondiale? Et bien sûr, cela représente toujours un risque pour le commerce en Europe car elle est fortement exposée aux échanges commerciaux qui transitent par le canal de Suez. Les Etats-Unis le sont en partie également.
Mais si vous réfléchissez à ce que pourrait être le pire scénario, pour ainsi dire, pour l’économie mondiale, il faudrait vraiment que cela affecte les prix de l’énergie – le prix du pétrole devrait augmenter par exemple. Et c’est un scénario que l’on pourrait imaginer si la crise devait s’aggraver. »
Q : Au-delà de la crise en mer Rouge, la directrice générale de l’OMC a fait part à plusieurs reprises ces dernières semaines de ses préoccupations à l’égard du commerce international. L’OMC publie habituellement ses statistique en avril mais que pouvez-vous nous dire déjà?
R : « Dans nos dernières prévisions publiées en octobre, nous avions prévu que le volume du commerce mondial de marchandises augmenterait de 0,8% l’an dernier – le chiffre final sera nettement inférieur – puis de 3,3% cette année. Ces projections, en particulier pour 2023, semblent en effet trop optimistes aujourd’hui.
C’est principalement lié au fait que l’Europe se porte moins bien que prévu. Les Etats-Unis s’en sortent mieux que prévu, l’Inde aussi. Mais l’Europe représente une part disproportionnée dans le commerce mondial, ce qui se reflétera dans les chiffres du commerce.
Mais je dois également dire que le commerce (mondial) des services se porte très, très bien, avec en 2023, au cours des trois premiers trimestres, un taux de croissance annualisé de 9%. C’est donc un point positif. Grâce notamment à la demande touristique, en particulier de la part de la Chine. »
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