Le ton est encore monté lundi, quand un porte-parole du Premier ministre David Cameron a affirmé que Londres réfléchissait à un « recours d’ordre juridique » pour contester des contrôles aux « motivations politiques et totalement disproportionnés » effectués à la frontière de Gibraltar par la police espagnole.
David Cameron, qui avait appelé la semaine dernière son homologue Mariano Rajoy pour l’avertir d’un « risque réel » de dégradation des relations bilatérales à propos de Gibraltar, est « clairement déçu par le fait que l’Espagne n’a pas mis fin ce week-end aux contrôles supplémentaires », a indiqué Downing Street.
« Nous sommes maintenant en train d’examiner les recours d’ordre juridique à notre disposition », a dit le porte-parole. « Ce serait une démarche sans précédent, donc nous voulons l’examiner avec attention avant de prendre la décision d’engager des poursuites », a-t-il ajouté, sans préciser quelle serait l’instance choisie pour une telle action.
Afin de tenter de calmer la situation, la Commission européenne avait proposé la semaine dernière de dépêcher en septembre ou en octobre un groupe d’experts à la frontière pour vérifier si les contrôles n’étaient pas disproportionnés.
Mais le ministère espagnol des Affaires étrangères a répondu lundi que Madrid ne « renoncerait pas » à ces contrôles, soulignant qu’ils étaient obligatoires étant donné que Gibraltar, comme le Royaume-Uni, n’appartenait pas à l’espace Schengen.
L’Espagne a de son côté annoncé étudier la possibilité de porter le contentieux sur Gibraltar devant les Nations unies ou la Cour internationale de justice de La Haye, sur des points de souveraineté concernant l’enclave rocheuse.
Le ministère espagnol a indiqué que Madrid envisageait également de faire front commun devant les instances internationales avec l’Argentine, qui revendique la souveraineté sur les îles Malouines, un autre territoire britannique, situé dans l’Atlantique sud.
« Entre les Malouines et Gibraltar il y a des éléments communs », a estimé le ministère.
Cédé en 1713 à la Grande-Bretagne aux termes du traité d’Utrecht, Gibraltar, un territoire de 7 km2 peuplé de 30.000 habitants situé dans le sud de la péninsule ibérique, est au centre de tensions récurrentes entre Londres et Madrid, qui en revendique la souveraineté.
L’Espagne affirme n’avoir cédé à perpétuité à Londres que la ville et le château de Gibraltar, ainsi que le port et les fortifications, mais pas ses eaux, ce qui entraîne régulièrement des différends liés aux droits de pêche.
Fin juillet, les autorités de Gibraltar ont ainsi coulé en Méditerranée, au large des côtes du rocher, des blocs de béton formant un récif artificiel supposé servir de refuge à des espèces sous-marines. L’Espagne affirme qu’il s’agit d’une entrave au travail de ses pêcheurs.
De longues files d’attente se sont alors formées à la frontière entre l’Espagne et Gibraltar, qui a immédiatement accusé Madrid d’avoir multiplié les contrôles par mesure de représailles. La situation s’est envenimée quand Madrid a dit envisager un péage de 50 euros pour entrer et sortir de ce territoire, bulle de prospérité à côté d’une Espagne en crise.
Dans ce climat tendu, des navires de guerre britanniques ont commencé à appareiller lundi d’Angleterre pour des manoeuvres en Méditerranée, au cours desquelles une frégate, le HMS Westminster, doit faire escale à Gibraltar.
Ces exercices « Cougar’13 », qui se déroulent en Méditerranée et dans le Golfe et impliquent quatre navires de guerre, sont prévus de longue date selon Londres, mais ils ont été interprétés dans la presse espagnole comme étant une tentative d’intimidation britannique.
Le HMS Westminster doit quitter Portsmouth (sud de l’Angleterre) mardi pour atteindre Gibraltar d’ici à une semaine, selon le ministère britannique de la Défense. La frégate a été précédée lundi du porte-hélicoptères HMS Illustrious, qui a quitté Portsmouth lundi matin. Le navire a été autorisé par l’Espagne à faire escale sur la base navale de Rota, dans le sud.